Douze dimanches de suite, j’ai coiffé ma casquette Dynamique culte et je me suis promenée sur la toile pour découvrir les initiatives cultuelles de mes collègues. Après avoir commencé par les cultes en direct de l’UEPAL, mon horizon s’est ouvert vers la France de l’intérieur (EPUdF) mais aussi vers les cantons francophones suisses. Parallèlement, j’ai secondé mon époux, le pasteur Amaury Charras, dans la coordination et le développement d’une chaîne YouTube paroissiale (Sous les Platanes) et j’ai appris à organiser des cultes en visio-conférence dans le cadre des activités de l’Antenne Inclusive (paroisse Saint-Guillaume à Strasbourg). Cette grande pluralité d’approches a suscité en moi quelques observations.

Qui accueille qui ?

Etre confiné·e seul·e dans un presbytère ou avec d’autres, cela change tout pour un·e pasteur·e ! Tandis que les plus isolé·e·s ont proposé des formules très personnalisées, avec leur seul visage, d’autres ont pu compter sur les gens de leur maison. Progressivement, les plus équipé·e·s, mais aussi les plus habitué·e·s aux cultes participatifs dans leur communauté ont ouvert le champ des possibles en intégrant des paroissien·ne·s de tous les âges, en leur proposant de se filmer ou d’intervenir pendant un culte en visio. La question qui me reste est donc la suivante : est-ce de la responsabilité seule du pasteur d’accueillir et de représenter la communauté ou est ce un appel partagé ? Mon ecclésiologie, ma compréhension de l’Église, opte pour la seconde option, notamment parce qu’elle intègre la théologie des charismes, qui rappelle que chacun·e a des dons à développer et à partager.

Comme une sainte Cène

Plusieurs affirmations circulent : « rien ne pourra jamais remplacer un culte en présentiel » ; « c’est un pis-aller, une réponse urgente à une situation inédite » ; « les pasteur·e·s ne sont pas équipé·e·s et c’est un autre métier. » Que l’on soit d’accord ou non, il n’empêche, d’une part, que d’autres Églises investissent depuis longtemps les cultes virtuels et que, d’autre part, les jeunes sont ultra-connecté·e·s. Il me semble que la meilleure des options, si on se lance, est d’y apporter le soin le plus minutieux, comme s’il s’agissait d’une sainte Cène. Votre décor est-il aussi joli que serait votre nappe de communion ? Votre son et votre lumière sont-ils aussi travaillés que votre vaisselle de sainte Cène ? Vos paroles annoncent-elles l’Évangile de Jésus-Christ aussi intelligiblement et simplement que les paroles d’Institution ? Et, enfin : avez vous plaisir et joie à partager ce temps de
communion avec l’Église visible et invisible ? Y croyez-vous au moment où vous faites des gestes, parlez et proclamez ? Quelle Église pour quel après ? En trois mois, j’ai tant vu et entendu que je suis pleine d’enthousiasme : cultes live Facebook et Youtube, cultes par visio, cultes en audio, par téléphone, sur papier distribué dans les boites aux lettres matérielles et dématérialisées. Sans oublier les offres habituelles sur les chaînes publiques et parfois même locales ou encore les temps quotidiens préparés par des collectifs de pasteur·e·s (#linstantcommunion et Protestants 2.0). Çà et là, des paroissien·ne·s ont osé : célébrer chez eux sans le pasteur avec le déroulement liturgique ; rédiger, bricoler, répéter en vue d’une vidéo à rajouter au culte participatif ; inclure les enfants, les aîné·e·s et relayer, fièrement, le lien internet de leur paroisse, à des ami·e·s intéressé·e·s. Un peu partout, des collègues se sont exposé·e·s, ont dialogué entre eux pour échanger des trucs et astuces, ont acquis de nouvelles compétences et sont enfin entrés dans l’univers d’Instagram… sans jamais renoncer à leur appel premier : celui d’être au service du Christ, qui a parlé le langage de son temps et marché tranquillement sur les routes communes. Si l’après Covid est celui d’une plus grande écoute entre générations et d’un plus grand respect des fonctionnements mixtes, incluant des ministères classiques et d’autres plus pionniers, alors j’ai beaucoup d’espérance pour l’Église d’après !