Un think tank protestant. Depuis deux ans, une trentaine de personnes – intellectuels, scientifiques, économistes, juristes, médecins, entrepreneurs – se réunissent régulièrement à Paris autour d’un petit-déjeuner pour débattre d’une question sociale, économique ou politique : laïcité, bioéthique, migrations, entreprise, environnement ou encore communication. Présidé par Olivier Abel, professeur de philosophie et d’éthique à la Faculté libre de théologie protestante de Montpellier, ce cercle de réflexion dénommé Le Forum de Regardsprotestants, se veut « non seulement un lieu de débat et de témoignage pour les participants, mais aussi un lieu de production d’idées propres à alimenter le débat public et diffusées vers l’extérieur ». A son actif, déjà deux conventions: une première en septembre 2013 avec notamment pour thème « Quelle éthique en politique ? » et une seconde en novembre 2014 sur « Sens éthique et limites de la loi ». Une troisième est prévue le samedi 7 novembre prochain sur le transhumanisme.
Ce mardi 10 mars, une quinzaine de ses membres se sont retrouvés pour aborder la question des valeurs universelles dans lesquelles « l’homme protestant » pourrait se reconnaître. La discussion a permis d’en déterminer cinq : responsabilité, liberté, confiance, équité, écoute. Ces premières réflexions seront approfondies et feront l’objet d’une publication, peut-être sous la forme d’un abécédaire.
Protestinter reviendra sur ce sujet et plus généralement sur les travaux du Forum de Regardsprotestant.
Un peu plus d’un mois auparavant, le 27 janvier, François Clavairoly, le président de la Fédération Protestante de France (FPF), avait abordé cette question des « valeurs » lors d’une conférence au temple de l’Oratoire du Louvre à Paris. Evoquant les événements des 7 et 8 janvier ainsi que la manifestation du 11, il avait donné pour titre à son exposé : La spiritualité protestante peut-elle redonner du souffle à la République laïque ?
Cette spiritualité protestante, le président de la FPF la définit en trois mots : contestation, confiance et espérance.
– Elle est d’abord l’expression d’un esprit de contestation, dit-il. Cette spiritualité a toujours protesté, c’est-à-dire toujours attesté de sa foi, et elle a toujours contesté, le politique comme le religieux. Le protestant se revendique d’une liberté spirituelle imprenable à cause de cette pensée qu’entre lui et Dieu nul ne saurait se placer. Et ce n’est pas de l’orgueil. C’est ensuite une spiritualité de confiance. Les protestants, dans leur pluralité, ont la foi heureuse et confiante tout autant que critique et contestataire. Une spiritualité qui affirme que l’avenir n’est pas à redouter comme une menace, mais à bâtir comme le lieu de mille promesses encore inaccomplies. C’est enfin est une spiritualité de l’espérance. Une espérance à vivre dans le partage d’une double citoyenneté lucide: une citoyenneté terrestre, française, et une citoyenneté spirituelle, celle de la « république des cieux ».
La spiritualité protestante peut-elle redonner du souffle à la République française ?
– Aujourd’hui, les protestants ne sont pas décidés à rester les enfants sages et muets de la République. Ils désirent que leur voix s’exprime davantage et ils veulent souffler quelques idées à la République pour qu’elle surmonte le drame qui la frappe, répond François Clavairoly. En citant toutefois le journaliste Alain Duhamel qui lui a dit un jour « les protestants ne sont ni scandaleux ni tragiques. Par conséquent, on ne les entend pas ! »
Au Forum de Regardsprotestants de relever le défi.