Dimanche, vers midi, en 2019. Le pasteur prononce les paroles de bénédiction et d’envoi, les fidèles chantent un dernier cantique et laissent sortir leur ministre qui va se poster à la sortie pour saluer. En général, il attend… un certain temps. Dès que chacun a posé son livre de cantique sur sa chaise ou son banc, avant même de reprendre sac et manteau, ce sont les premières rencontres entre voisins. De petits groupes se forment dans le temple, pendant que d’autres papotent en attendant leur tour pour remercier le pasteur, une pièce ou un billet dans la main pour le dernier tronc de l’entraide. Si certains se hâtent pour mettre en route le déjeuner, nombreux sont ceux qui se parlent encore dans la cour ou sur le trottoir. Tout cela est à multiplier lors des grands cultes festifs de rentrée de l’école biblique, de Pâques ou du Noël des enfants.

Du confinement…

Dimanche, vers midi, en 2020. Devant l’ordinateur, une famille ou une personne seule voit l’image du pasteur disparaître, le culte en vidéo vient de se terminer. Les annonces se font par e-mail, c’est préférable car la poste ne fonctionne pas très bien et personne n’a envie de multiplier les contacts. Si le télétravail est devenu banal, pourquoi pas le « téléculte » ?

On assiste à des trésors d’inventivité pour faire vivre la communauté malgré tout, surtout en se préoccupant des personnes isolées ou précaires et des enfants du catéchisme, ceux qui ont le plus besoin des activités cultuelles. Dimanche, vers midi, en 2021. Certains sont devant leurs ordinateurs, d’autres sont venus au culte, parfois après avoir hésité, dûment munis de leurs masques. Il faut réserver sa place si le temple est petit, c’est mieux si on veut être sûr d’entrer. Évidemment personne ne s’embrasse ni ne se serre la main, on se fait des signes. Pasteurs et conseils presbytéraux sont plus que jamais mobilisés pour faire vivre leurs paroisses, s’inspirant des idées des uns et des autres. Quelques paroissiens, en « surfant » sur internet, ont préféré se connecter sur le site d’un autre temple pour assister à un culte se déroulant à l’autre bout de la France. …

à la science-fiction

Dimanche, vers midi, en 2022. L’hologramme du pasteur vient de quitter le salon après quelques mots d’envoi et de bénédiction. L’adolescent de la famille vérifie que la connexion est bien coupée, tandis que la grand-mère venue déjeuner (clandestinement, cachée sous une couverture dans la voiture quand son fils est venu la chercher, faute d’attestation) demande pourquoi le pasteur n’est pas venu la saluer. « Depuis le temps que je suis dans cette paroisse, tout de même ! », grommelle-t-elle. Tout est devenu virtuel, on s’habitue mais c’est difficile à comprendre pour les personnes âgées. Alors, c’était mieux avant ? Oui. Indubitablement et pour une fois, c’était mieux avant la crise. Faisons-nous vacciner, battons-nous pour en sortir et retrouvons la joie d’être ensemble, de se faire piquer la joue par la barbe du monsieur qui nous a vu naître, nous exclamer devant la petite dernière si jolie de nos amis et d’acheter la confiture préparée avec amour par la dame de la Vente, qui la fait depuis 30 ans et qui a été tellement désolée de ne pas tenir son stand l’an dernier. Le mot Église vient du grec ekklesia qui signifie assemblée et désigne aussi bien l’ensemble des croyants en Christ que la communauté locale. Nous ne pouvons pas former une Église sans que nous puissions nous rassembler.