Dans toute vie collective apparaissent inévitablement des conflits. Pourtant, il y a une difficulté particulière à vivre cette réalité dans les communautés chrétiennes. Nous prendrons le mot « conflit » dans un sens très large, qui va de la tension non exprimée jusqu’au conflit ouvert.
Normalité du conflit
Le conflit n’est pas nécessairement l’expression du mal, du péché. Il est d’abord, et souvent, expression de la différence : nous n’avons pas les mêmes envies, les mêmes goûts, la même sensibilité, et ce dans tous les domaines : art, cuisine, réflexion, vie spirituelle. Et cette diversité peut amener toute sorte d’incompréhensions, de malaises, voire de frustrations. Dans une collectivité, j’ai besoin d’exister et d’être reconnu pour moi-même : il me faut apprendre à me situer par rapport aux autres. Quand le fonctionnement collectif ne favorise pas cela, je vais trouver des stratégies pour répondre à ce besoin. J’utiliserai des circuits de communication informelle avec ceux dont je me sens proche, jusqu’à créer une sorte de clan avec eux. Peut-être prendrai-je la parole devant les autres, les rares fois où j’en ai l’occasion, avec une force, voire une agressivité hors de propos.
Certaines tensions naissent aussi à certains moments clés, par exemple quand il y a du changement. Le cas le plus évident est l’adolescence. L’ado change, ce qui déjà est perturbant. Mais surtout, il veut changer son rapport aux autres, se situer différemment par rapport à eux, quitter l’enfance pour autre chose. Il n’est pas facile pour son entourage, surtout ses parents, de s’adapter. Il y a souvent des tensions, des désaccords parfois violents, au moins dans leurs expressions. […]