Les synodes régionaux ont eu lieu durant le mois de novembre dans toute la France. En région parisienne, les synodes luthérien et réformé ont pu débattre des projets régionaux. Pour la Région réformée, l’accent a été mis sur les services, les axes prioritaires et huit chantiers d’avenir. Focus sur le compagnonnage entre paroisses.
Chaque année durant deux ou trois jours, l’Église régionale se réunit et forme, par le rassemblement de son synode, le gouvernement de l’Église dans la région (Constitution, art. 8.1 et 9.1). C’est là que les délégués de chaque paroisse, laïcs et pasteurs, définissent les objectifs et les chantiers de la Région, qui seront mis en œuvre par la suite. Réuni durant deux jours au FIAP Jean-Monnet dans le 14e arrondissement de Paris, le synode de la Région réformée a examiné les propositions concrètes du projet de vie régionale, dont les grandes orientations avaient été données lors d’une précédente session.
Pourquoi cheminer ensemble
Dans les trois axes prioritaires que sont « Choisir de grandir », « Annoncer avant tout la Parole » et « Prendre soin du lien fraternel », huit chantiers ont été proposés et feront l’objet de développement au fil des mois dans Paroles protestantes. L’un d’eux traverse les différents axes du projet de vie ; s’agissant du compagnonnage entre paroisses, il relève à la fois de la dynamisation des Églises, de l’annonce de l’Évangile et de la solidarité.
Cette idée de cheminer ensemble entre communautés se fonde sur l’analyse des différentes paroisses de la Région. Certaines Églises locales paraissent avoir suffisamment de ressources pour mettre en œuvre les projets qui les inspirent et être, d’une certaine manière, autonomes dans leur fonctionnement et leur témoignage. Établies comme des phares dans le paysage ecclésial, elles bénéficient en général de moyens importants pour bâtir un témoignage et une communication qui s’étendent bien au-delà des frontières géographiques de l’association cultuelle. Leurs ressources humaines sont suffisantes pour créer, par exemple, des groupes de réflexion biblique ou de jeunesse pérennes. Elles disposent également des forces nécessaires pour élargir leur action aux domaines de la culture, de la solidarité ou de la formation. Leur tendance naturelle pourrait dès lors devenir l’autonomie, sans avoir réellement besoin du réseau fraternel des autres.
Échanger en marchant
Ailleurs, certaines Églises locales, par manque d’effectif ou de pasteur assurent une présence dans la ville et un témoignage de la Parole dans des proportions plus restreintes, recentrant parfois leurs forces sur le culte et la catéchèse. Beaucoup de leurs membres disent fournir des efforts importants pour que soit proposée une variété d’activités, au risque d’émietter les énergies disponibles et d’essouffler les bénévoles. Pour ces paroisses parfois sans pasteur sur de longues périodes, la nécessité est cruciale de trouver des soutiens et d’établir des liens avec d’autres. Il existe bien sûr les échanges de chaire avec les communautés voisines, parfois la fusion de groupes d’école biblique ou des formations communes de catéchètes, mais il s’agit là souvent de mesures prises pour garantir la pérennité de ce qui existe déjà.
Bâtir un compagnonnage entre deux paroisses est bien différent. Cela implique en premier lieu d’établir un partenariat réel, qui respecte les attentes de chaque communauté et propose un projet spécifique afin de ne pas alimenter la dépendance de l’une par rapport à l’autre. Être compagnons de route est en effet incompatible avec la notion de parrainage où l’aide apportée serait à sens unique. La marche commune implique un échange à travers lequel les deux paroisses pourraient se nourrir mutuellement ; elle se rapprocherait plutôt d’un partenariat de long terme qui puisse perdurer au-delà des arrivées ou des départs des pasteurs ou des liens d’amitié particuliers entre paroissiens. Et cela sous-entend que chaque communauté y trouve une satisfaction fondamentale.
Le phare et l’étoile
Du point de vue d’une paroisse en situation parfois précaire, l’apport de forces extérieures peut paraître d’emblée positif, mais le partenariat demande aussi que la paroisse plus forte numériquement puisse bénéfi- cier d’une dimension qui lui manque, qu’il s’agisse de la fraîcheur, du sens de l’accueil ou d’une spécialité de l’autre communauté. Par ailleurs, pour être réellement constructif, le soutien doit être prévu, cadré, organisé. Si l’Église établie comme un phare dans le paysage ecclésial peut apporter une forme d’expérience et de stabilité ou des moyens, la plus petite peut par exemple développer un point de spécialité, une caractéristique qui la fera briller comme une étoile. On peut penser ici à des conférences, une étude biblique ou une manière d’approcher les textes, tout est possible. L’essentiel semble de bâtir ensemble un projet où chacun participe à créer quelque chose avec l’autre.
Les deux communautés doivent-elles être voisines ? Cela ne semblait pas nécessaire, au vu des discussions partagées au synode entre délégués des paroisses de la Région. Beaucoup ont été attirés par le fait de se relier entre communautés assez différentes plutôt qu’entre paroisses voisines susceptibles de devenir par la suite filiales l’une de l’autre. La question du discernement est donc posée : avec qui établir des liens pour qu’ils manifestent la différence tout en valorisant des intérêts communs susceptibles de former un projet fort ? Bien sûr, la Région peut proposer des contacts, mais les consistoires seraient également susceptibles de le faire, et même les paroisses elles- mêmes, au regard de goûts communs sur des sujets précis comme l’accueil, l’exégèse, la musique, etc.
Bien sûr, la Région peut proposer des contacts, mais les consistoires seraient également susceptibles de le faire, et même les paroisses elles- mêmes, au regard de goûts communs sur des sujets précis comme l’accueil, l’exégèse, la musique, etc.
Créer des possibles par convergence
Sur le même modèle, peuvent s’imaginer des liens forts entre communautés de tailles voisines qui souhaiteraient renforcer leurs actions ou proposer de concert un ensemble d’actions dont elles ne pourraient rêver seules, ou qui demandent des infrastructures complexes. L’accueil de personnes sans ressources, par exemple, peut demander à la fois des compétences en matière de recherche de logement et de travail, de soins et de nourriture, parfois d’alphabétisation et de vestiaire, voire de faire partie d’un maillage de soutien plus large encore. L’ensemble est hors de portée de communautés isolées et peut constituer un socle intéressant pour une réalisation inter-paroissiale. Faire converger des énergies, des envies et des capacités qui paraissent jusqu’à présent se déployer chacune dans le cloisonnement d’une Église particulière donnerait à tous un espace et une respiration qui sont la marque des grands projets. Sans compter que la mise en place d’une action commune génère toujours la rencontre, et que de la rencontre naissent trois bienfaits : l’accueil, le témoignage et la gratitude. Somme toute, trois manières de décliner les axes prioritaires de la Région.