Chaque fois que nous ouvrons les portes du temple du Marais, les samedis après-midi pour les visites au public, les passants sont comme aimantés : touristes qui déambulent de la Bastille vers Saint-Paul, habitants du quartier, flâneurs du Marais, tous s’arrêtent et gravissent les quelques marches du parvis pour jeter un œil à cette église à la façade imposante et au dôme qui s’élève presque aussi haut que la colonne de juillet. À l’intérieur, ils découvrent alors une architecture complexe caractérisée par une rotonde centrale surplombée d’un dôme à 33 m de hauteur – œuvre de François Mansard – et entourée de chapelles surélevées, le tout dans un style baroque. Devenu le premier lieu de culte protestant dans Paris , ce temple aux dimensions modestes, mais idéalement situé, est un lieu stratégique pour accueillir les personnes qui cherchent Dieu. Les paroissiens en charge des visites le samedi ont été spécialement formés pour cet accueil où il faut tout à la fois parler d’Histoire ou d’architecture et répondre de sa foi en Jésus-Christ. Nombreux sont ceux qui ont retrouvé le chemin de la foi en montant ces quelques marches…
Pourtant, depuis le début de cette année 2019, c’est à une autre surprise que les visiteurs du temple sont confrontés : celle d ’un gigantesque échafaudage qui occupe toute la rotonde et s’élève jusqu’à la base du dôme. Suite à une chute de pierre dans le chœur, le 25 décembre dernier, les services de la Ville de Paris ont dû procéder à une analyse du bâtiment et ont découvert des fragilités dans le dôme : d’autres pierres menacent de tomber. Il a donc fallu dans un premier temps sécuriser le temple grâce à un plancher de bois installé à la base de la coupole et lancer une étude sur les mouvements structurels du bâtiment afin de comprendre les raisons de ces fissures. Résultat : la communauté devra vivre avec des échafaudages pendant au moins deux ans.
Après avoir passé six semaines en exil, le temps qu’il a fallu pour mettre en route le chantier et installer les échafaudages, accueillis d’abord à la Halle des Blancs-Manteaux prêtée gracieusement par la Mairie du 4e arrondissement, puis dans la chapelle Sainte-Aure prêtée par l ’Église catholique Saint-Paul Saint-Louis, le Marais a retrouvé son temple garni d’une gigantesque forêt métallique. Certains trouvent ce décor urbain post-moderne tout à fait à leur goût, d’autres s’y sentent un peu oppressés, d’autres encore pleurent la jolie coupole désormais invisible.
Mais depuis le début de cette aventure, le Conseil presbytéral a choisi de faire de ces nouvelles contraintes une opportunité : l’occasion de franchir les murs pour aller vers les autres, d’habiter l’espace différemment, de réfléchir à des installations artistiques, des œuvres éphémères, des activités alternatives, l’occasion aussi de resserrer les liens avec la Ville de Paris, propriétaire des lieux, etc. Les touristes qui continuent d’entrer chaque fois que les portes sont ouvertes sont souvent très déçus en découvrant l’échafaudage, mais nous continuerons à ouvrir les portes et à les questionner : qu’êtes-vous venus voir dans cette église ? Les pierres ne sont plus vraiment visibles, mais il reste les pierres vivantes, une communauté qui loue le Seigneur et témoigne de l’Évangile, un lieu où Dieu se donne à rencontrer non pas dans le visible, mais dans l’invisible de sa Parole. Venez et voyez !