Le Nouveau Testament utilise des images multiples pour parler de l’Église. D’une part, Dieu sait que nous en avons besoin pour bien comprendre. D’autre part, cela nous rappelle que l’Église, comme Dieu lui-même, ne pourra jamais entrer dans des définitions. L’essentiel échappera toujours à notre finitude. L’image que je retiens est celle de « corps du Christ » (1 Co 12,27). Le corps est à la fois très concret et… spirituel ! Au commencement, le corps du Christ est celui du crucifié. Mais il est, surtout, celui du ressuscité. Or, c’est le même : le corps du ressuscité porte les traces de la crucifixion. Je pense que l’Église est, dans sa réalité concrète, plus souvent corps souffrant, mortel, du Christ, alors que c’est son corps relevé, ressuscité, qu’elle doit incarner. C’est cela, pour moi, le défi essentiel de l’Église. Les petitesses de l’Église sont les nôtres et nous renvoient à nos limites personnelles. Le Christ nous invite (travail de toute une vie) à devenir, en Église, une réalité spirituelle, donc à être animé de l’Esprit du Dieu vivant, de l’Esprit du ressuscité.
Église locale et Église du Christ
Alors que nous nous posons des questions sur l’Église, laissons-la plutôt nous questionner. Si, par exemple, nous nous angoissons pour la survie d’un bâtiment, ou nous nous endettons pour la réhabilitation d’un orgue historique, osons nous poser la question de savoir si cela ne rejoint pas notre angoisse de la mort. Avons-nous peur de la mort de l’Église car nous avons peur de… mourir ? Mais l’histoire nous montre que les Églises meurent et vivent. C’est un processus naturel (déjà Ap 2-3). Ainsi, nous manquons de foi en confondant notre Église locale (l’UEPAL), qui forcément mourra un jour, et l’Église, dont le Christ nous a promis qu’elle était éternelle (Mt 16,18). Vu le nombre croissant de chrétiens sur la terre, il semblerait que Dieu ait tenu parole depuis deux mille ans. Cessons d’avoir peur de l’avenir de nos Églises historiques et contingentes et faisons confiance à la fidélité de Dieu à ses promesses. L’Église, aussi, est ressuscitée : n’ayons donc plus peur de sa mort. Vivons, en son sein, en ressuscités et que cela se voit !
L’Eglise, toute en paradoxes
L’Église est une et multiple. Elle est locale et universelle. Elle est institution et événement. Elle est affaire d’individus singuliers et communauté englobante. Elle est constituée de jeunes et de vieux. Elle est habitée de conservateurs et de novateurs. Elle est le lieu d’un cadre structurant (une liturgie) et celui de l’advenue sans cesse renouvelée d’une parole libératrice (une prédication). Pourquoi ces dimensions paradoxales ? Dieu est vivant, sa présence se vit par le lien de l’Esprit Saint, en chaque chrétien. Ces paradoxes sont à assumer comme une force et non comme une faiblesse. Plus il y aura de la vie entre eux et plus ce sera le signe d’une Église… vivante qui sort des sentiers battus.