Historiquement, à la différence de Luther qui a redécouvert l’épître aux Romains, les anabaptistes ont mis l’accent sur les évangiles. Aujourd’hui encore, c’est une des spécificités des mennonites par rapport aux autres évangéliques, qui recherchent davantage dans les épîtres de Paul des orientations pour leurs Églises. La théologie anabaptiste-mennonite rejetterait-elle les écrits du grand apôtre ?

Commençons par le dire clairement : pas plus les anabaptistes au 16e siècle que les mennonites aujourd’hui n’ont rejeté ou ne rejettent l’apôtre Paul et ses épîtres ! Par contre, il est vrai qu’ils questionnent une certaine lecture de ses écrits, qui de leur point de vue n’intègre pas ou ne fait pas suffisamment le lien avec le principe de la Nachfolge Christi ou « suivance du Christ ». Essayons de comprendre, en partant d’une perspective historique.

La redécouverte de Luther

Luther, lorsqu’il redécouvre en 1512-1513 le message de Paul en Romains 1.16-17, fait l’expérience d’une profonde libération. Angoissé qu’il était jusque-là par la crainte qu’il ne pourrait jamais « en faire assez » pour satisfaire à la colère d’un Dieu présenté comme juge bien plus que comme Père, il trouve l’apaisement dans l’affirmation de l’apôtre « Le juste vivra par la foi ».

Pour le réformateur allemand, à la lumière de cette lecture, la justice de Dieu n’est plus celle d’un Dieu qui juge et punit quiconque ne satisfait pas à ses exigences, mais une justice donnée, accordée gratuitement, dont Dieu revêt. Cette justification est l’œuvre exclusive de Dieu, elle consiste en […]