L’ouvrage Les fondements éthiques du féminisme, Réflexions à partir du contexte africain, de Fifamè Fidèle Houssou Gandonou, a été publié en 2016 aux éditions Globethics (426 pages). Il s’agit de sa thèse de doctorat en théologie. L’auteure est pasteure méthodiste et enseignante à l’Université Protestante de l’Afrique de l’Ouest. Elle a récemment été nommée Secrétaire Générale de l’Alliance Biblique du Bénin.
Fifamè Fidèle commence par démontrer que les injustices faites aux femmes sont universelles et situées au même niveau que les autres injustices légitimement dénoncées. Elles se retrouvent dans toutes les classes sociales et toutes les sociétés et la religion fait partie du problème. Le féminisme quant à lui est un combat éthique, que l’on peut considérer comme pratique et théorique, et a des fondements éthiques (c’est-à-dire moraux) et chrétiens. L’étude porte essentiellement sur l’Afrique subsaharienne, et en particulier sur le Bénin d’où est originaire l’auteure, qui a écrit cette thèse pour encourager les Béninois et les Africains en général à voir le féminisme sous un nouvel angle.
“La condition féminine en Afrique” – Première partie
Dans la première partie, l’auteure prend comme support trois œuvres de la littérature féminine francophone : La parole aux négresses d’Awa THIAM, Une si longue lettre de Mariama BÂ et Que vivent les femmes d’Afrique ? de Tanella BONI.
Chacune de ces auteures fait ressortir les problèmes éthiques liés à la condition féminine dans le contexte africain par des témoignages, la description des us et coutumes, les réalités quotidiennes et sociales ainsi que la recherche du bonheur par les femmes. L’ouvrage montre qu’un bouleversement structurel est indispensable et doit être basé sur l’amour véritable dont parle Paul en Galates 5 : 13-15.
Le regard de l’homme sur la femme
Le regard que l’homme porte sur la femme est très important, car il impacte l’attitude de celle-ci au quotidien. Si ce regard peut sembler de prime abord positif, les femmes étant souvent considérées par les hommes comme indispensables à leur bonheur (fils, frères, maris…), elles ne sont en réalité que des mères, des sœurs, des épouses destinées à servir les mâles de leur clan. L’auteure souligne que les notions de matriarcat et de lignées matrilinéaires sont des légendes, car ce sont toujours les membres masculins qui en tirent profit. Finalement, c’est donc un regard négatif qui est posé sur les femmes : elles sont objets, ont un statut inférieur et doivent accepter de ne pas être respectées. Leur dépendance passe de celle du père à celle du mari, ce qui entraîne des dérives comme la dot, la polygamie, les mariages forcés ou l’excision…
Elles sont exclues de la vie publique, vues comme potentiellement dangereuses et subissent toute leur vie le discours sur leur infériorité. À l’instar des Amazones du Dahomey, qui devaient rester célibataires, les quelques femmes influentes perdent leur féminité. Cette exclusion est également psychologique, les hommes leur rappelant qu’elles vivent dans un monde qui appartient à eux.
Elles sont vues comme sorcières et folles et les Églises ne sont pas les dernières à les stigmatiser, quand bien même le pasteur serait une femme. Leur statut est dévalué. Des réunions de femmes peuvent être dirigées par des hommes, ce qui est un autre type de violence ! Elles sont des faire-valoir, des exécutantes, des « décorations », et n’existent qu’au travers de leur époux, alors que dans les Églises, ce sont les femmes qui sont majoritaires. Les hommes sont également prisonniers de ce […]