Il s’agit là d’un ouvrage assez neuf, étant donné le faible intérêt des protestants pour cette question. Intérêt tout de même dans la mesure où l’œcuménisme risque de faire oublier la persistance de grosses divergences entre catholiques et protestants.

Cela se voit d’abord quand on veut justement définir l’Église. Les protestants distinguent « l’Église visible », celle  qui réunit effectivement des fidèles, et l’Église invisible », celle des croyants, connue de Dieu seul. Les catholiques ignorent cette dualité : il n’y a, pour eux, que « l’Église », une et infaillible, avec son clergé et ses pompes.

Les catholiques sont volontiers critiques à l’égard des protestants, dénonçant leur dispersion institutionnelle. Sans doute. Mais il ne faut pas oublier la capacité qu’ont aussi les protestants de se regrouper lorsqu’il s’avère qu’ils sont spirituellement proches. C’est ce qui s’est passé lorsqu’au XVIe siècle les Églises morave et vaudoise, plus anciennes, ont, sans problème, rejoint la Réforme. Sans doute y a-t-il entre protestants des différences de style, d’institutions, mais celles-ci sont considérées comme secondaires.

Par contre, ce sont encore des différences graves qui font obstacle à une éventuelle unification des chrétiens. Pour l’essentiel il s’agit de la définition de ce qui est sacré. Pour les catholiques, le sacré est multiple. Il s’agit de personnes, de lieux, d’objets, de moments… Pour les protestants cette dispersion n’existe pas. Seul est sacré le moment du culte : quand la parole de Dieu est délivrée correctement, quand les sacrements (le baptême, la communion) sont effectués selon les règles, et rien d’autre. Rappelons aussi, chez les catholiques, la vision hiérarchisée du peuple chrétien : le simple fidèle, le prêtre, le pape. Alors que les protestants sont attachés à l’égalité de tous. Bien sûr, il faut rappeler la douloureuse impossibilité de l’inter-communion, que l’on veut croire, un jour prochain, abolie. […]