Lors du baptême de Jésus, les cieux se sont ouverts et l’Esprit est descendu sur lui comme une colombe. On imagine que cet Esprit va lui permettre de faire des choses extraordinaires, mais au lieu de cela : « Jésus fut emmené par l’Esprit au désert, pour être mis à l’épreuve par le diable[1]. » L’Esprit a conduit Jésus dans l’épreuve pour lui permettre d’éprouver son ministère.
La première épreuve proposée par le diable est celle du matérialisme. Après avoir jeûné, Jésus a faim. Le diable lui propose de transformer les pierres en pain, mais Jésus répond : « L’être humain ne vivra pas de pain seulement, mais de toute parole qui sort de la bouche de Dieu. »
La deuxième épreuve est celle de la séduction. Le diable emmène Jésus en haut du temple de Jérusalem et lui propose de se jeter dans le vide pour que des anges viennent à son secours. Si ça avait été le cas, Jésus aurait été adulé et tout le monde l’aurait adoré, mais il a répondu : « Tu ne provoqueras pas le Seigneur, ton Dieu. »
La troisième épreuve est celle du pouvoir. Le diable conduit Jésus sur une haute montagne et lui montre tous les royaumes du monde. Il se propose de les lui donner s’il se prosterne devant lui, mais Jésus répond : « C’est devant le Seigneur, ton Dieu, que tu te prosterneras, et c’est à lui seul que tu rendras un culte. »
Situées au commencement de son ministère, les trois tentations ont valeur de programme. Avec l’Esprit qui lui a été remis, Jésus aurait pu s’enrichir, séduire et gouverner, mais c’est par la pauvreté, l’amour et le service qu’il accomplit sa vocation.
En évoquant le personnage du diable, le récit de l’Évangile nous dit que les tentations de l’argent, de la séduction et du pouvoir exercent sur l’humain une autorité qui va au-delà de ce qui peut se raisonner. L’argent, la séduction et le pouvoir sont des fascinations qui peuvent prendre possession de la liberté d’un sujet. Pour s’enrichir, séduire ou gouverner, on a vu des hommes renoncer à ce qu’ils avaient de plus cher.
Le Grand Inquisiteur
Le récit de la tentation de Jésus est une des clés de l’Évangile comme le montre une légende racontée par Dostoïevski. Elle met en scène Jésus qui revient à Séville et qui prêche comme il l’a fait dans les évangiles. Il est arrêté par les autorités religieuses et visité dans son cachot par le Grand Inquisiteur. Ce dernier ne doute pas qu’il est le Christ, mais il lui explique que l’Église a dû « corriger » son évangile. Pour exercer son autorité, elle a été « obligée » de cultiver la richesse, la séduction et le pouvoir.
[1] Mt 4.1.