Il m’énerve quand il mange une pomme. « Oui, mais je t’énerverais aussi si je mangeais une pomme ou des chips ou un toast bien grillé en Chine »… pas faux. 

Il m’énerve quand il fait son « Monsieur je-sais-tout », mais à 22 h 30, quand j’ai une question, c’est bien à lui que je la pose. 

Il m’énerve quand il repousse son rendez-vous médical au lieu d’y aller, qu’il se mouche le nez avec force ou qu’il sent la crème anti-inflammatoire. Bref, il m’énerve quand il est malade. 

Il m’énerve quand il laisse traîner notre carnet de famille dans la salle à manger, quand il me demande où sont ses affaires et que le contenu de ses poches tombe et glisse dans les recoins du fauteuil dès qu’il s’allonge devant la télévision. 

Il m’énerve quand la première chose qu’il fait dans la nouvelle maison est d’installer internet, quand il veut me faire un bisou alors quand je travaille dans la cuisine et qu’il me parle au beau milieu du livre audio que j’écoute. 

Il m’énerve quand il me reproche de faire trop de blagues stupides à table, de parler trop longtemps aux gens dans la rue, quand il m’explique qu’il y aurait sûrement un moyen plus efficace de laver les chaussettes pour ne pas toujours avoir des piles de chaussettes à trier, quand il me répète que je n’utilise pas les bons ustensiles lorsque je cuisine. 

Il m’énerve si souvent ! Parfois pour des détails, parfois pour des trucs importants.

Il m’agace, me rend nerveuse, me donne envie de l’envoyer promener, de claquer sans raison la porte en partant. 

Et bien sûr, il m’énerve encore plus quand il garde son calme alors que moi, je suis dans tous mes états. 

Oh oui, vivre ensemble, s’aimer, construire une famille, gérer un foyer, être partenaire, c’est parfois compliqué, parfois frustrant, parfois étouffant. Il nous arrive d’être fatigués de négocier, de faire des efforts, de tout donner. On peut penser que la répartition est injuste. On ressasse des pensées amères, des frustrations, on en a marre. On est même plus certaine d’avoir encore la patience, la force, ni même l’envie de continuer ce chemin plus longtemps. 

Et puis, un jour, il doit s’absenter quelques jours pour le boulot. Et là, après avoir savouré la solitude durant quelques soirées, on commence à sentir le manque. 

Il me manque quand il n’est pas là. 

L’entendre respirer à côté de moi dans le lit me manque.

Son rire me manque quand il n’est pas là et que j’aimerais lui raconter la dernière blague lue sur internet. 

Son regard me manque quand il n’est pas là. Ce regard qui me dit « je t’aime et je suis là pour toi », ce regard qui m’encourage, qui me porte dans mes projets. 

Son point de vue sur les choses me manque quand il n’est pas là, toute l’étendue de sa connaissance, sa manière d’articuler les réponses et les questions qu’on se pose ensemble. 

Son calme me manque quand il n’est pas là, son art de rester serein en toutes circonstances. Quand il est là, je suis rassurée. […]