La première parole de Dieu sur l’humain dans la Genèse est : « Il n’est pas bon pour l’humain d’être seul, je lui ferai une aide qui sera son vis-à-vis. » Le défi posé par ce texte de la Genèse est celui de la rencontre singulière entre un humain et son prochain. Le lieu où cette rencontre est la plus entière et la plus intime est la sexualité, qui s’inscrit au croisement du désir et de l’altérité.

Le désir est la marque de notre vie, il est le moteur qui nous pousse à agir : celui qui n’a plus de désir est mort. Et l’altérité est le défi premier qui se pose au sujet. La réflexion éthique peut se ramener à une seule question : quelle place l’humain laisse-t-il à l’autre dans son environnement ? Celui qui ne se pose pas cette question est un pervers.

Une relation unique à son prochain

La question de la sexualité se pose donc à tous les âges, si nous ne la confondons pas avec la génitalité. Elle se déploie dans la relation unique d’un sujet à son prochain lorsqu’ils entrent dans un vis-à-vis intime. La sexualité des séniors est une question taboue, et pourtant le désir d’intimité ne dépend ni de l’âge ni de la libido. Elle appelle de notre part trois remarques.

Toutes les sociétés ont leurs canons de la beauté. Pour la nôtre, un corps séduisant est un corps jeune, en bonne santé, sportif et si possible bronzé. Un ancien n’est pas jeune, son corps est fatigué et il porte les cicatrices de son histoire, mais on n’est pas obligé de se conformer aux canons de notre société et on a le droit de trouver qu’il y a des vieillards magnifiques. J’aime à penser que leurs cicatrices sont leurs décorations.

« Mais vivre sans tendresse… »

Avec l’âge le désir sexuel se fait moins ardent, ce qui peut être l’occasion d’une relation plus apaisée dans laquelle la tendresse remplace la performance sexuelle. Il faut du temps, de la délicatesse, de la parole et de l’écoute pour atteindre l’harmonie des corps. Pour ce défi qui se pose à tous les âges, l’expérience est une aide précieuse.

Je suis toujours ému lorsque je croise un couple âgé dont la complicité est transparente. Ils ont traversé les temps et ils ont su durer. À les voir, je pense à cette relecture d’un texte liturgique : « J’aime les vieux, dit Dieu, les anciens dans l’amour, ceux dont l’amour a duré, qui ont vieilli dans l’amour ; ceux dont l’amour s’est embelli comme le bon vin qui vieillit avec l’âge, qui ne se dégrade pas avec le temps, mais s’enrichit de saveurs nouvelles. »