L’écriture manuscrite présente des atouts pédagogiques mais aussi psychologiques, pour les petits comme pour les grands.
Notre monde se numérise de plus en plus, tant et si bien que, pour adapter les élèves aux réalités du monde qui les attend, les enseignants finlandais ont décidé de remplacer les cours d’écriture cursive par l’apprentissage de la saisie avec un clavier. Désormais, c’est ce mode d’acquisition de l’écriture qui fait loi. Une mode qu’avaient un temps adopté les Etats-Unis, qui ont pourtant fait machine arrière récemment. 14 états ont réhabilité l’apprentissage de l’écriture par la formation de lettres à la main. Et ça n’est pas pour rien.
L’écriture manuelle, au cœur des apprentissages
Tenir un stylo, l’incliner, appuyer plus ou moins fort sur le papier requiert la maîtrise de la main, du geste, et favorise la motricité fine, donc le développement de l’enfant, ses habiletés motrices et sa perception dans l’espace. Toutes choses facultatives quand on utilise un clavier, dont l’usage exclusif mobilise aussi beaucoup moins de connexions neuronales. L’écriture manuelle, cursive (dite aussi « attachée ») est un vrai atout pour les apprentissages. Car pour que le geste devienne naturel, automatique, nous allons devoir stimuler notre mémoire à long terme.
De nombreuses études montrent que les enfants qui écrivent à la main possèdent un vocabulaire plus riche et varié que ceux qui n’utilisent que le numérique, et ce à l’écrit, comme à l’oral.
Cela s’explique sans doute par la capacité de l’écriture manuelle à faire travailler notre mémoire. Et pour retenir, c’est essentiel. Si, comme moi, on vous a répété que pour mieux apprendre, il fallait recopier (une poésie, une leçon…) c’est sans doute parce que cette activité nécessite une coordination visuo-motrice, et combine plusieurs sens : le kinesthésique (mouvement), le visuel (voir ce que l’on fait), et parfois l’auditif lorsqu’on se relit (même mentalement). Non seulement la concentration est meilleure, voire renforcée, mais cela permet un triple ancrage. Les élèves qui écrivent à la main sont aussi de meilleurs lecteurs, car on reconnaît d’autant plus facilement une lettre, un mot, que l’on connaît pour l’avoir soi-même déjà écrit.
Cette tendance se confirme tout au long de la scolarité. Ainsi, à l’université, il existe une réelle différence entre les étudiants qui prennent des notes à la main, et ceux qui tapent leurs cours. Dans le premier cas, l’écriture manuelle étant plus lente, elle oblige l’étudiant à mieux écouter, pour effectuer un tri instantané des informations entendues et, déjà, sélectionner celles qui sont primordiales. Ce faisant, il commence non seulement à les intégrer, mais est capable de les analyser et de les synthétiser en même temps qu’il en prend connaissance. Cela mobilise différentes zones du cerveau qui doivent se coordonner entre elles, et accentue ses performances cognitives. Une étude faite auprès d’étudiants américains montre que ceux qui prennent leurs cours de façon manuelle ont un taux de réussite aux examens supérieur à ceux qui utilisent un ordinateur portable. Il semble aussi que les informations ainsi acquises soient encodées plus longtemps : on s’en souvient durablement.
Quand la pensée devient mot
Mais l’écriture à la main a encore bien des atouts dans sa manche ! On peut littéralement « coucher » sur le papier ses pensées. Dès lors, l’écriture se fait créative. Et cette créativité est notoirement renforcée par le geste. Pour certains écrivains ou poètes, ce « bras-le-corps » avec la plume ou la page blanche est un élément incontournable de leur art. Des moments faits d’exaltation ou de rage, de ratures ou de pages froissées. Tel un artisan, l’auteur modèle le papier tout autant qu’il cisèle ses phrases.
Mais pour tout un chacun, l’écriture peut aussi se faire expressive, voire thérapeutique. Extérioriser ce qui nous pèse (un événement, un deuil, une séparation…) relève d’un véritable vide-tête. Poser les mots, c’est comme déposer les émotions qui les accompagnent et aider, déjà, à les apaiser. Sans forcément chercher à les analyser, mais au moins pour les extérioriser. Et peut-être aussi pour en garder une trace, à la manière d’un journal intime. Relire n’est pas nécessaire quand écrire est déjà suffisant pour alléger. Selon plusieurs études, les patients qui écrivent sont globalement moins stressés et moins déprimés que les autres et dorment mieux… Poser ce qui nous préoccupe ou encombre notre esprit avant de s’endormir est d’ailleurs une bonne habitude à prendre. Certains thérapeutes conseillent de la faire de manière quotidienne.
Dans son dernier ouvrage, Bloum, Florence Servan-Schreiber, coach et chantre de la psychologie positive, développe tous les aspects de l’écriture thérapeutique. Dans ce podcast, elle explique comment l’écriture aide à s’épanouir et à se libérer, avec des effets quasiment équivalents à ceux de la méditation.
Et en cette rentrée, on parlera mots, lecture et écriture sur Fréquence Protestante.
Mardi 8 septembre à 18h, c’est la reprise d’Inspirations positives, avec une thématique autour des mots : « Quand lire et écrire font du bien ».
A écouter sur 100.7 FM Paris, ou sur le web – et à ré-écouter en podcast sur le site de la radio.
Bonne rentrée, et surtout : sortez vos cahiers et vos stylos !