Si vous êtes une femme pressée au bord de la crise de nerfs, il n’y a pas lieu de se résigner mais il est temps de se ressaisir et d’agir pour plus de bien-être.

Dans les années 80, Michèle Fitoussi, écrivain et journaliste à ELLE, décrivait déjà dans son ouvrage éponyme « Le ras-le-bol des superwomen »*, ce « trop plein d’activités » que vivent la plupart des femmes : travail, famille, enfants, couple, pressing et courses remplissent le quotidien de nos contemporaines. Trente ans après le constat est édifiant : rien n’a changé et même, les choses ont sans doute empiré…
Je rencontre tous les jours dans mon cabinet de sophrologue et dans les ateliers que j’anime des femmes exsangues qui, lorsqu’elles s’écroulent enfin dans un fauteuil soupirent « Je veux lâcher tout ce stress !».

Seule au milieu d’un océan de responsabilités

La journée d’une femme du XXI° siècle fait parfois penser au parcours de la combattante.
Quand je demande à une nouvelle cliente de me décrire sa journée – pour mieux appréhender le contexte de stress dans lequel elle évolue – voici en général ce que j’entends :

  • 7h : Je me lève en fanfare. J’avale mon petit déjeuner tout en préparant les enfants.
  • 8h30 : Je ressens la minute de culpabilité en sortant de la crèche (ou de l’école), pensant que je ne verrai plus mes chères petites têtes blondes avant une dizaine d’heures (dans le meilleur des cas).
  • 8h31-9h : Je me rends à mon travail dans les transports en commun (bondés) ou au milieu du trafic (saturé). L’énervement est déjà au maximum.
  • 9h15 : J’arrive (en retard) à mon travail, et, en plus, blafarde.
  • 9h15-12h30 : Je travaille c’est-à-dire que je traite les dossiers non finis de la veille et tente de repousser ceux du jour qui seront traités le lendemain (si tout va bien). En résumé : coups de fil, mails, réunions, rapports, etc,etc… Clients, fournisseurs, collègues émaillent des heures agitées.
  • 12h31 : Le moment où je réalise que j’ai oublié de faire pipi…
  • 12h45 : Je déjeune, dans les bons jours, au restaurant d’entreprise surchauffé, sinon c’est une salade avalée devant mon écran ou un sandwich pris dans la rue en faisant les courses du jour, forcément indispensables (un protège-cahier mauve, un carnet de timbres, une cagoule qui ne gratte pas…).
  • 14h : Reprise des hostilités. Au choix : je vois surgir mon chef de service, toujours un peu hostile, avec une nouvelle pile de dossiers à traiter en urgence, ou bien c’est un contretemps qui m’amène à repenser tout le travail de la matinée, ou bien encore une idée de génie tombée du siège, qui revisite en profondeur le plan marketing sur lequel nous planchons depuis 6 mois… J’essaie de poursuivre tout en gérant les interruptions inopinées de collègues accablées cherchant du réconfort, le tout en surfant entre les mails, notifications et coups de fil…
  • Vers 16h : Je profite d’une accalmie pour recherche rapidement sur internet les coordonnées d’un ophtalmologiste/dentiste/orthophoniste/ORL… pour mon aîné.
  • 16h15 : Je tombe enfin sur le secrétariat du spécialiste en question qui me propose un seul rendez-vous : à 15h15 – et dans trois mois.
  • 16h16 : Je sens à nouveau monter une vague de culpabilité en réalisant que ma négligence obère gravement la santé de mon enfant.
  • 18h : Mon chef ayant enfin le dos tourné, je pars en rasant les murs pour récupérer les enfants à la crèche/l’école. Obnubilée par ma montre, j’en oublie presque leurs bisous…
  • 18h35 : Ultime marathon : courir à la Poste avant qu’elle ne ferme (ou chez le cordonnier, ou à la boulangerie…).
  • 19h : J’arrive à la maison, les enfants sur les talons. Pendant un bon moment, on ne se quitte plus : devoirs, confidences, douches… tout en assurant le dîner du soir. De l’importance de pas confondre l’huile d’olive et le gel pour le bain…
  • 19h30-20h30 : retour du père de famille qui demande ce qu’on mange.
  • 20h30 : Nous dînons en famille.
  • 21h : Je termine la vaisselle en solo
  • 21h15 : Coucher des enfants et début d’une soirée à deux. Mon mari, devant la télé, moi, devant la planche à repasser (quand je n’ai pas rapporté à relire les dossiers d’il y a 8 jours).
  • 22h30 : Je prépare la journée du lendemain : timbres dans le cahier de texte de l’aîné, protège-cahier pour la cadette, cagoule pour le petit dernier… et goûters pour tout le monde. Je peste : qui a mangé le dernier BN ??
  • 23h : Je me douche en titubant et pensant aux dossiers du lendemain (enfin, d’aujourd’hui…).
  • 23h30 : Je me couche, fourbue.

Lorsque ma cliente n’a pas – ou plus – d’enfants à la maison, l’addition n’en est pas moins lourde, elle cite alors : vieux parents à accompagner à toute sorte de consultations, soutien psychologique (voire financier) aux plus jeunes de la famille, dîners de convenance à organiser au mieux, soucis de santé, travaux à superviser, mari jeune retraité à stimuler… qui viennent à peine nuancer ce tableau.

C’est en général après cette litanie qu’elle conclut, résignée : « Je n’y arrive plus… ».
On le serait à moins ! Ce qui ne manque jamais de m’étonner, c’est que, la plupart du temps, cette femme remarquable s’en veut de ne pas pouvoir en faire plus, de ne pas être assez organisée, témoignant à sa décharge : « Si je ne m’en sors pas, c’est que je m’y prend mal… ». Certains ouvrages lui préconisent même de se lever plus tôt… Malheureusement dans quelques cas, les réserves sont tellement épuisées que s’installe une phase dépressive, décompensation ultime du stress chronique qu’elles ont traversé. Dans cette période, plus question de sublimer quoi que ce soit. Désinsérées par un ou plusieurs arrêts maladie, mal considérées par leur entreprise (ou leur conjoint), elles errent en pensant que rien ne sera jamais plus comme avant. Le ressort est cassé et elles estiment que c’est de leur faute. Le risque de burn-out maternel est réel (j’y reviendrai sous peu).

Toutes ont un point commun : c’est souvent seules qu’elles affrontent les tâches quotidiennes, refusant mordicus (leur orgueil n’y survivrait pas) de se faire aider – et encore moins de demander quoi que ce soit. Le credo « c’est à moi de me débrouiller seule » a la dent dure. Certains hommes ricanent : « Vous avez voulu la libération de la femme ? Travailler ? Et bien maintenant, assumez ! ». Et nombre de leurs épouses ne sont pas loin de les approuver. Comment me direz-vous ! Et l’égalité homme/femme dans le couple ? L’Observatoire des inégalités est formel : 65% des tâches domestiques quotidiennes sont assumées par les femmes. Et cela a peu évolué depuis ces dernières années : en onze ans, le temps moyen journalier consacré par les femmes au travail domestique a baissé de 22 minutes, passant de 3h48 en 1999 à 3h26 en 2010; dans le même temps celui des hommes a augmenté d’une minute, de 1h59 à 2h. Par ailleurs, les femmes s’occupent, au quotidien des tâches les moins valorisées et les plus répétitives (ménage, courses, s’occuper des enfants) tandis que les hommes prennent en charge ce qui se voit et dure (monter un meuble, négocier un prêt…).

Alors, comment faire ?

  • Prendre réellement conscience de la situation. On a tôt fait de se laisser envahir sans s’en rendre compte, par gentillesse ou bienveillance. Evaluez aussi votre niveau de fatigue (physique) et de lassitude (psychologique), laquelle se traduit généralement par le l’impatience ou de l’irritabilité excessives – et que d’aucun jugent disproportionnées.
  • Comprendre ses limites. Beaucoup de femmes débordent d’énergie mais il est important d’identifier son propre seuil de stress et de fatigue. A partir de quand aurait-il fallu dire stop ?
  • Ne pas dire oui à tout ni tout le monde. Rendre service, oui – s’oublier, non. Si vous avez comme précepte « les autres d’abord », passez à « moi aussi ». Apprenez à dire non.
  • Déléguer, et oser demander de l’aide. Il faut lutter contre le syndrome de la bonne élève et réaliser qu’une seule personne ne saurait tout faire – et demander n’est en rien humiliant ni dévalorisant. Beaucoup de femmes confient que leur conjoint les aide bien volontiers si elles leur demandent. Et elles se sont définitivement ôté de l’esprit que ça lui viendrait de lui-même
  • Limiter son perfectionnisme. Il y a fort à parier que la personne à laquelle vous allez déléguer ne fera pas « aussi bien que vous ». Lâchez prise ! Le plus important est de se décharger et de retrouver du temps.
  • Lutter contre la culpabilité. Ça n’est pas « votre faute » si vous n’y arrivez pas. Il n’est écrit nulle part que la charge de la famille vous incombe seule. Pas plus qu’il n’y a à culpabiliser de ne pas « tout faire ».
  • Prendre (à nouveau) du temps pour soi. Le corps comme le cerveau ont besoin de repos mais aussi de prise de distance, d’évasion, de changement d’intérêts… C’est le moment de débuter une activité pour soi, un hobby, ou tout simplement de (re)prendre une habitude plaisir : un café avec une copine, une balade seule, un tour à la bibliothèque, une expo… Prendre ce temps, c’est le bloquer sur son agenda, comme un rendez-vous, sinon on a toujours mieux à faire. Et si vous commenciez demain ?

*Editions Calmann-Levy, 1987.

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