Achats de fournitures, factures, rappels ou renouvellement de garde-robe sont quasiment incontournables au moment de la rentrée, alors même que les vacances nous ont exposées à des dépenses parfois excessives ou à quelques imprévus. Le moral en berne, et le compte près du rouge, on se promet de « faire attention », tout en se sentant frustré – et en rêvant d’un « petit plaisir » qui nous ferait du bien. Si vous avez tendance à déraper, mettez-vous à la méthode BISOU, dès qu’une envie d’achat pointe son nez.

Nous savons que nous consommons, et parfois nous sur-consommons, des biens pas forcément utiles, dont certains ne nous font plaisir qu’au moment où on les achète. Les objets s’accumulent, les placards débordent, et nos finances sont exsangues. Sans tomber dans la décroissance à tout crin, on peut devenir des consommateurs raisonnés et responsables. Pour avoir mieux conscience de ce qui nous plaît et convient, plutôt que d’accumuler les babioles qui ont une durée de vie limitée, la méthode BISOU peut créer un déclic, voire un vrai changement de comportement.

Cet acronyme désigne les 5 première lettres d’une démarche que l’on peut s’appliquer dès que nous entrons dans une réflexion ou un processus d’achat : B pour besoin, I pour immédiat, S pour semblable, O pour origine, U pour utile. Voyons un peu…

– Besoin

La vraie bonne question à se poser : ai-je besoin de ce vêtement, de cet objet ? Et là, je vous entends récriminer (si, si) : tout ne relève pas des besoins. Dans la notion de besoin, il y a un petit côté austère, voire culpabilisant (protestant ?). On peut en avoir tout simplement envie : parce que cet objet est beau, parce qu’il nous plaît, parce qu’on a eu un coup de cœur… L’envie, c’est important ! Oui, mais combien de biens possédez-vous déjà, achetés impulsivement sur ces critères ? Et qui ont – bizarrement – perdu leur pouvoir magique. Ce fabuleux chemisier a t-il effectivement participé à votre confiance en vous ? Alors qu’il a vraisemblablement contribué à une perte totale de confiance de votre banquier dans votre capacité d’épargne… Parfois l’achat n’est qu’une recherche de réconfort, dans un moment difficile de la vie. Il s’agit typiquement d’une erreur dans les besoins, car il est peu probable que le bien en question vous apporte le réconfort auquel vous aspirez – et qui réside vraisemblablement ailleurs. Mais si votre besoin relève du plaisir vrai et intense, craquez alors pour un objet qui sublime ce plaisir, pas pour un ersatz bas de gamme, sous prétexte qu’il est moins cher. Et surtout : le besoin ne serait-il pas artificiellement créé par le fabricant ? N’êtes vous pas tout simplement en train de vous faire manipuler par la pub ou le marketing ?

– Immédiat
« Je le prends ! ». Une réplique bien connue, et sur laquelle comptent la plupart des boutiques qui mettent en scène les achats. Mais suis-je obligé de l’acheter maintenant ? Les achats impulsifs jouent sur l’immédiateté, le plaisir rapide et le refus de la frustration. Si vous prenez du temps – et du recul, votre jugement sera certainement différent. Éventuellement, prenez cet objet (ou ce vêtement sur son cintre) et continuez à faire le tour du magasin pendant plusieurs minutes, et demandez-vous au final si vous en avez encore envie de l’acheter. Mieux, notez la référence et dites-vous que vous reviendrez le lendemain – au minimum. Oui, il y a un risque que la dernière lampe soit vendue (sinon, vous la trouverez dans une autre boutique de l’enseigne). Mais vous plaira-t-elle encore demain ? Il est même fort possible que vous l’oubliiez totalement.

– Semblable
N’ai-je pas déjà un objet/un vêtement similaire ou qui fait le même usage ? Vous allez réaliser que vous possédez (déjà) beaucoup, et ressortir de vos placards des petites merveilles qui ne vous coûteront pas un sou. J’en fais régulièrement l’expérience avec une collection de sac à mains (le point sensible de beaucoup de femmes – avec les chaussures), constituée sur de nombreuses années. J’en extrais à chaque changement de saison (voire chaque mois) un modèle non porté depuis quelque temps. Et que j’arbore avec une merveilleuse sensation de nouveauté. Mais à d’autres moment, je me souviens aussi de ce pantalon que j’adore, et que je peux tout à fait remettre au goût du jour en lui ajoutant une bande de gros grain, pour un look smoking imparable (et 3 mètres de galon à 3 euros chez Toto). Vous n’êtes pas pingre, vous participez à l’économie circulaire. Tout se recycle, tout se transforme…

– Origine
Un coup d’œil sur l’étiquette du produit vous indiquera où il a été fabriqué – et on peut de là imaginer comment. Ces nouvelles baskets sont-elles au prix de mon confort – et du travail des enfants ? Ce énième t-shirt à prix cassé participe-t-il à l’exploitation de femmes pauvres à l’autre bout du monde ? Sa jolie teinture rose fushia est-elle déversée en fin de cycle dans la rivière attenante à son usine de production ? Ne soyons pas dans le déni : avons-nous envie de contribuer à cette chaîne mondiale de l’exploitation, même si elle ne se fait pas sous nos yeux ? Acheter est un pouvoir (j’en ai déjà un peu parlé ici), on peut consommer plus responsable – même si ça n’est pas toujours facile.
D’où l’intérêt aussi de dépenser pour des produits de meilleure qualité, labellisés FairTrade ou France (ils créent ou maintiennent de l’emploi), plus beaux – peut-être plus chers mais en tout cas plus durables. C’est une démarche exigeante – et pas toujours facile – car certains biens ne sont produits que dans certaines zones de la planète. Mais pour beaucoup d’autres, on a le choix.

– Utile
Cet objet va-t-il m’apporter un vrai service/bien-être/confort ? Bien sûr, tout n’est pas utile : les objets de décoration ne « servent » à rien – pas plus que l’art ou la culture, si on veut pousser la logique bassement utilitaire jusqu’au bout. Mais l’utilité peut se mesurer aussi en termes de bien-être, de facilité, de confort ou de plaisir. Et si c’est le cas, autant que le bien ou l’objet optimise cette utilité ! Méfions-nous des fausses valeurs ajoutées, celles qui nous sont vantées par les fabricants de produits, technologiques notamment, et dont les évolutions sont extrêmement minces (je pense, spontanément, à un smartphone qui serait estampillé d’une pomme…) et qui ne justifient ni le changement de ce produit, ni son prix.

Au delà de la méthode BISOU, ce sont des vraies questions qui pointent, et que certains transforment en véritables défis : une semaine, un mois ou une année sans acheter de produits neufs. On ne cède plus à la facilité du « tout tout de suite » et on se lance alors dans le remplacement de pièces, la réparation, le recyclage… Cela suppose d’être astucieux, inventif ou bricoleur pour trouver des alternatives intéressantes. La consommation humaine épuise les ressources de la Terre, à une date qui « avance » d’année en année. Dès le mois de juillet, nous consommons des ressources que la nature est incapable de renouveler; nous avons une « dette » vis à vis de la Création. Ne participons pas à ce déficit.

Pour aller plus loin :
– J’arrête de surconsommer de Marie Lefèvre et Herveline Verbeken, éditions Eyrolles
– le site Rien de neuf, pour trouver des idées – et surtout des alternatives : https://riendeneuf.org/