Présenté à Cannes cette année dans la section Un Certain Regard, après une première mondiale au festival de Sundance, After Yang est sorti ce mercredi en salles.

Sans doute le film de science-fiction le plus délicat et tendre qu’il m’ait été donné de voir, tout en abordant des thématiques essentielles à l’existence humaine avec grande intelligence et sensibilité.

Colin Farrell et Jodie Turner-Smith, dans les rôles respectifs de Jake et Kyra, forment un couple qui a adopté une petite fille chinoise nommée Mika (Malea Emma Tjandrawidjaja). Pour l’aider à en apprendre davantage sur son héritage (et aussi pour qu’il s’occupe d’elle), ils ont ensuite acheté Yang (Justin H. Min), un androïde qui devient un frère de substitution. Aimant et dévoué, il est un excellent compagnon, et tout le monde le traite comme un membre de la famille. Lorsque Yang tombe en panne, Jake cherche un moyen de le réparer. Dans le processus, Jake découvre alors la mémoire de son androïde.

Basé sur la nouvelle Saying Goodbye to Yang faisant elle-même partie d’une anthologie de science-fiction intitulée Children of the New World, publiée en 2016 par l’auteur Alexander Weinstein, After Yang nous transporte dans un futur proche et minimaliste où les humains vivent organiquement aux côtés de clones et d’androïdes appelés techno-sapiens. Cependant, bien que les différences entre les humains et les machines soient imperceptibles, les préjugés demeurent.

Les individus de chair et de sang se croient bien supérieurs aux autres, même s’il est évident que les robots ont développé des capacités et des émotions propres qui surpassent même parfois celles de leurs créateurs.

Avec un style mêlant harmonieusement le concret et l’éthéré, le réalisateur Kogonada nous entraîne dans un voyage méditatif qui remet en question les fondements de la nature humaine et explore nos sentiments les plus profonds : le désir de se lier intimement à quelqu’un d’autre, la difficulté d’exprimer librement nos émotions et la quête incessante du bonheur. After Yang saisit également l’occasion d’examiner ce qui définit réellement l’identité culturelle et individuelle. Dans le cas de Yang l’androïde, il commence à s’interroger sur ses origines et ses racines – surtout lorsqu’il se rend compte que malgré sa connaissance encyclopédique de la Chine, il n’y a jamais vécu. Pour la petite Mika, ses questions proviennent du fait que Jake et Kyra ne sont pas ses parents biologiques.

After Yang offre également une réflexion intéressante sur la mort, le difficile processus de deuil et l’impossibilité de connaître et de comprendre complètement quelqu’un d’autre, même si cette personne fait partie de notre famille nucléaire. Bien qu’ayant vécu avec Yang pendant des années, et vivant sous le même toit, le couple découvre à son sujet des secrets et des mystères qu’ils n’auraient jamais imaginés. Des détails qui révèlent également leur manque de communication et d’attention et qui, après la perte, les laissent avec le remords de ne pas avoir su profiter du peu de temps dont ils disposaient pour le comprendre, non pas comme un robot, mais comme un autre semblable.

After Yang est une histoire extrêmement touchante, un vrai bijou de SF pour toutes et tous (même celles et ceux qui n’aiment pas la SF), qui nous montre à quel point la vie est éphémère et nous apprend à être là – de corps et d’esprit – dans l’instant présent, à profiter de chaque moment et à apprécier les relations avec nos proches. Alors que les personnages réfléchissent à la façon de trouver l’amour et l’humanité, les spectateurs investis ne pourront s’empêcher de penser à ceux, vivants ou morts, qui ont marqué leur propre existence, encourageant un niveau d’empathie rarement atteint à l’écran.