Mais, comme je ne suis pas de la meute et que mon avis diverge, alors je vous dis pourquoi j’ai aimé ce film.

Au Libéria, pays d’Afrique ravagé par la guerre, le docteur Miguel Leon (Javier Bardem), médecin humanitaire, et le docteur Wren Petersen (Charlize Theron), directrice d’une ONG, tombent passionnément amoureux l’un de l’autre. S’ils sont tous les deux engagés corps et âme dans leur mission, ils n’en sont pas moins profondément divisés sur les politiques à adopter pour tenter de régler le conflit qui fait rage. Ils devront surmonter leurs clivages et le chaos qui menace d’emporter le pays tout entier – sous peine de voir leur amour voler en éclats…

Oui, j’assume pleinement, The last face m’a ému. L’histoire nous plonge au cœur d’une Afrique en prise avec ces multiples conflits armés et sanguinaires. Si l’occident politiquement est assez peu impliquée ou trop intéressée (c’est parfois un euphémisme), l’aide humanitaire se trouve, elle, confrontée à l’horreur et essaye d’apporter un minimum de solidarité et d’aide médicale sur le terrain et avec les réfugiés. Sean Penn nous parle de ces hommes et femmes qui mettent leurs propres vies en danger, voir en marge, se donnant totalement dans cette mission qu’ils ont choisie sans, non plus, en dresser un tableau idyllique mais en révélant les doutes ou paradoxes qui peuvent se manifester. C’est ainsi, par exemple, qu’est évoqué cette « adrénaline à l’urgence » que ressentent les médecins… ce « besoin de nous »qui pousse à agir mais qui peut aussi devenir une forme de drogue et induire alors un sentiment étrange où la violence devient presque attendue, souhaitée pour pouvoir agir. « Sans guerre il n’y aurait peut être pas de nous » dira ainsi Miguel à Wren. Car, en plus, oui Sean Penn ajoute une romance à tout cela, comme l’aurait d’ailleurs fait n’importe quel réalisateur américain. Mais finalement, n’en déplaisent à ceux qui se gaussent des bons sentiments, on peut aussi aimer là dans ce genre d’endroits.

Au cœur de ce film, comment ne pas être touché par des scènes d’une puissance extrême ? Une césarienne en pleine jungle montrant alors que la vie est plus forte que tout. Qu’elle prend le dessus sur l’abjecte, l’innommable, quand un homme décide de lui donner sa chance. La mort aussi de cet enfant, habituellement plein de douceur et de rires sur le visage, pour protéger son père de ces fous furieux qui ont perdus le sens de l’humain. Scènes d’horreur de massacres mais aussi images d’une grande beauté et musique sublime signée du grand Hans Zimmer. Comment ne pas non plus se laisser toucher et interpeller par le discours final de Wren évoquant les réfugiés ? Ces hommes et femmes, dit-elle, que nous voyons comme s’ils l’avaient toujours été, oubliant qu’ils sont plombiers, mécaniciens, professeurs… des hommes et des femmes comme vous et moi. Et puis il y a des réflexions très intéressantes et subtiles également sur la foi, Dieu et notre rôle dans tout ça. Des phrases qui sonnent justes et percutent comme celle-là que je vous livre en exemple (et traduite en français) : « Souvent pour les enfants le mot amour s’épelle T-E-M-P-S. »

Alors oui, je reconnais que Jean Reno nous a fait rire par quelques répliques un peu caricaturales… que le mélo est parfois facile… maisThe last face reste pour moi un film à voir qui peut être profondément utile. Le risque n’étant pas d’ailleurs que le film soit mauvais mais que surtout nous ne devenions insensibles à la souffrance du prochain, si proche de nous, peut-être d’une autre couleur, d’une autre culture (mais pas forcément)… trop préoccupés par nos standards bien établis et notre trop plein d’une impression de savoir extrême et de supériorité mal placée.