À quelque chose malheur est bon, dit une maxime populaire, même si l’application est parfois bien difficile… Pourtant, si la COVID-19 a mis à l’arrêt un grand nombre d’entre nous, et d’artistes notamment, elle a su aussi devenir pour certains un temps pour créer autrement. C’est aussi, avec elle, l’occasion parfois de revenir à des choses essentielles de l’existence humaine, de (re)découvrir, par exemple, au cœur de sillons anciens de nos vies, des graines de foi qui ont pu y être semées. La preuve par l’exemple avec deux grands artistes américains qui viennent de sortir un album pour exprimer leur foi en Christ dans ce temps de turbulence mondiale.

Harry Connick Jr – Alone With My Faith

Harry Connick Jr. s’est fait un nom comme l’un des plus grands crooners de sa génération, depuis ses débuts en 1987, apparaissant, qui plus est, aux quatre coins de l’industrie du divertissement tantôt comme acteur, animateur de télévision, vedette de Broadway ou compositeur-chanteur-musicien. Mais tout au long de cette carrière déjà extraordinaire, Harry a, malgré tout, considéré la famille et la foi comme les éléments fondateurs de toute sa vie. C’est ce qu’il évoque dans son nouvel album Alone With My Faith, né de la récente saison de confinement où il a passé plusieurs mois seul dans son home studio à écrire et arranger des chansons, à enregistrer et jouer toutes les parties, et à monter le projet final. Connick décrit ce processus d’enregistrement comme quelque chose qui lui a apporté paix et réconfort en particulier grâce aux textes de ces chansons.

« My life has changed / my world is uncertain / everything’s strange / everything’s new » (Ma vie a changé / mon monde est incertain / tout est étrange / tout est nouveau), chante Harry Connick Jr de manière parfaitement appropriée à la situation pour ouvrir la chanson titre d’un superbe album bouillonnant d’espérance créé pourtant au milieu du chaos de l’année dernière. Il y propose un audacieux mélange de chansons nouvelles et anciennes. On y découvre ainsi quelques hymnes traditionnels comme Because He Lives (Parce qu’il vit), Amazing Grace (Grâce infinie), The Old Rugged Cross (Sur le mont du Calvaire) et How Great Thou Art (Dieu tout-puissant), après leurs avoir fait subir quelques changements stylistiques qui donnent à l’album un aspect plus R&B par moments. L’utilisation, par exemple, de l’orgue Hammond B-3 sur The Old Rugged Cross donne à la chanson un bel élan de Black-Gospel. Mais c’est aussi un contenu plus « original » où la créativité et l’expression artistique personnelle de Connick s’expriment pleinement avec, entre autres, Look Who I Found, Be not Afraid (qui a été écrit par Richard Buford), God and My Gospel, All These Miracle, Look Who I Found et Thank You For Waiting. On connait, bien évidemment, la qualité de vocaliste et de pianiste d’Harry Connick Jr mais sur Alone With My Faith, toute l’étendue de son talent musical se révèle brillamment, en jouant de tous les instruments et en interprétant toutes les parties vocales, ce qui représente parfois plus de 25 pistes.

Alone With My Faith est un album imprégné de la créativité de Connick dans tous ses éléments, et un album vers lequel l’auditeur reviendra régulièrement tant pour le plaisir de l’écoute que pour être encouragé dans son cheminement de foi.

Carrie Underwood – My Savior

Carrie Underwood est l’une des grandes voix actuelles de la Country. Elle s’est faite connaître en 2005 en remportant la quatrième saison de l’émission de télé-crochet American Idol. Six mois après avoir sorti son premier album de Noël, My Gift, produit par Greg Wells et avec la participation de John Legend, Underwood lève le voile sur My Savior, son premier album de Country Gospel, reflet d’un temps d’introspection « made in pandémie » l’ayant amenée à se pencher sur son propre héritage et sa foi. Exprimer sa foi en chanson n’est probablement plus aussi facilement accepté en 2021 qu’à l’époque de Dolly Parton, ou d’un Johnny Cash, qui a sans doute composé plus de musique chrétienne et gospel que quiconque. Avoir l’audace de prononcer le mot Jésus dans une chanson peut déclencher du rejet pour de larges pans de la société de nos jours. Mais comme Dolly Parton ou Cash, Carrie Underwood peut se le permettre, non seulement parce qu’elle le fait bien, mais parce qu’on fleure bon la sincérité, l’authenticité qui s’exprime. Chrétienne convaincue et engagée, elle avait déjà eu l’occasion d’interpréter un hymne ici ou là dans le passé, mais la chanteuse a décidé d’aller plus loin en mettant son empreinte vocale sur quelques joyaux de l’Église. Et c’est le choix de la tradition qui l’a emporté, puisque’Underwood et le producteur David Gracia (qui avait travaillé avec elle sur son album Cry Pretty de 2018) ont décidé de garder des arrangements rustiques proches des titres et des ambiances originales tout en y mêlant intelligemment de la texture et beaucoup d’inspiration.

On y découvrira une magnifique version de Nothing But the Blood of Jesus (Rien que le sang de Jésus), accompagnée d’une guitare acoustique et de nappes misant principalement sur les harmonies vocales et la fraîcheur de l’expression qui s’en émane.

Underwood va encore plus loin dans l’émotion sur Just as I Am (Tel que je suis), prenant son temps pour nuancer chaque mot de cet hymne d’invitation que l’évangéliste baptiste Billy Graham avait utilisé un nombre incalculable de fois pour clôturer ses croisades. Ceux qui apprécient les envolées vocales d’Underwood adoreront son interprétation de Victory in Jesus, dont l’influence bluegrass est également remarquable. Mention spéciale également à CeCe Winans qui fait une belle intervention avec un son assuré sur Great is Thy Faithfulness (Dieu ta fidélité). Plutôt que d’essayer de se surpasser mutuellement, les deux voix semblent davantage unies dans leurs louanges à notre Créateur… et c’est bien beau !

Alors, oui, on pourra me rétorquer évidemment que la faiblesse de cet album est qu’il est prévisible. Pour ceux qui ont grandi avec un recueil d’hymnes dans les mains, il n’y a certainement pas vraiment de chansons dans l’offre qui nous fasse tirer l’oreille. Tout est très propre… aucun excès. De plus, Underwood ne cherche pas ici de performances. Elle chante simplement avec son cœur et quelques intonations vocales différentes par ci par là.

Underwood conclut son album avec la reprise d’Amazing Grace (Grâce infinie), qui, bien qu’elle ait été reprise par un nombre incalculable de chanteurs depuis sa sortie il y a quelque 250 ans, touche toujours une corde sensible. Lorsqu’un chœur de soutien intervient brièvement au cours du deuxième refrain pour accompagner et rehausser la voix légère d’Underwood, on comprend pourquoi elle a choisi de terminer l’album de cette façon. Courte et apaisante, la chanson rappelle à jamais la puissance qui se dégage de la rencontre parfaite entre une mélodie et un texte, mais aussi de celle entre l’être humain et son Dieu.