Comme une actrice, premier long métrage de Sébastien Bailly, revisite habilement le triangle amoureux en y mêlant une sorte de jeu de rôle fantastique où se questionnent à la fois les rapports de couple et des enjeux tant artistiques que physiques.
Anna (Julie Gayet), actrice proche de la cinquantaine, est quittée par son mari, Antoine (Benjamin Biolay), metteur en scène de théâtre. Elle se découvre alors un pouvoir qui lui permet de changer d’apparence physique et de se transformer en qui elle souhaite. Prête à tout pour ne pas le perdre, elle va utiliser ce pouvoir pour mettre son couple à l’épreuve, jusqu’à prendre l’apparence de Delphine (Agathe Bonitzer), la jeune femme avec laquelle il entretient une liaison. Mais ce double jeu pourrait se retourner contre elle…
Comme une actrice… joli titre pour un film qui joue précisément sur le jeu de rôle dans les relations amoureuses, l’apparence physique, l’incarnation ou plutôt la métamorphose.
Et le situer chez un couple d’artistes, un metteur en scène et une comédienne, amplifie naturellement l’effet escompté et ouvre à une compréhension élargie. L’histoire est pourtant, à la base, on ne peut plus (tristement) classique. Un couple qui vieillit… une femme qui se sent vieillir en abordant la cinquantaine… un homme qui retrouve, lui, des élans de jeunesse et se laisse aisément séduire par une jeune autre comédienne qui ne dit pas non… l’affaire est dans le sac en somme ! C’est ce besoin douloureux de retrouver l’amour qui s’éloigne et se perd, de combattre le sentiment d’abandon et de se placer devant le miroir pour lui demander : Qui est la plus belle ?
Mais non, Sébastien Bailly ne s’arrête pas là et va beaucoup plus loin, osant magnifier ce qui est plutôt laid et banal. Il en fait une très belle histoire, gentiment mystérieuse et surtout très profonde et touchante. Il faut dire que les trois acteurs qui incarnent ces personnages se prêtent parfaitement au scénario et font un travail remarquable.
Biolay, Gayet et Bonitzer forment un trio où la beauté rejoint une forme de sobriété qui assoit les thématiques et donnent l’occasion de travailler sereinement la pensée du spectateur.
De plus, le fait de recourir à une part de fantastique, dans cette même réflexion offerte, nous transporte en dehors du réel, tel un conte le permettrait, une invitation à traverser le fameux miroir comme le suggère la scène d’ouverture où l’on se tient derrière la glace de sa loge. C’est là que commence et s’opère la métamorphose d’une actrice. Mais c’est aussi devant ce même miroir que se révèle la transformation naturelle physique que le temps opère inexorablement… Mais tout cela en s’encrant en même temps délibérément dans un registre de tragédie romantique où la passion est la cheville ouvrière qui cherche à vaincre malgré tout.
En sortie salles, ce mercredi 8 mars, Comme une actrice devient une belle occasion de s’intéresser autrement… aux femmes.
- Pour information : Il existe une association, le Tunnel de la comédienne de 50 ans [créée en 2015 au sein d’AAFA (Actrices et acteurs de France associes). Elle s’est donné pour mission de faire bouger le curseur des représentations des femmes de plus de 50 ans au cinéma et à la télévision.