Retour des zombies sur la Croisette après ceux, il y a trois ans, de Jarmusch et de son The Dead Don’t Die qui se moquait par là même du Trumpisme. C’est cette fois-ci Michel Hazanavicius qui s’y colle par le biais de Coupez !, un remake improbable et, somme tout, audacieux d’une comédie japonaise culte One Cut of the Dead – Ne coupez pas, réalisée en 2017 par Shin’ichirô Ueda.

Remake d’un film de zombies japonais populaire

Romain Duris incarne Rémi, un réalisateur dont la réputation d’être abordable lui a valu de travailler régulièrement pour des publicités, des séries dramatiques et des reconstitutions de crimes. Son producteur Mounir (Lyès Salem) lui propose un nouveau projet pour la sortie d’une nouvelle plateforme de streaming : le remake d’un film de zombies japonais populaire, diffusé en direct à la télévision et tourné en plan séquence.

Coupez ! est un film carrément malicieux par la structure même qui le compose. Le premier film du genre série Z, qui se révélera plus tard en abyme, consiste donc en un véritable plan séquence d’une trentaine de minutes. Il joue déjà, à la base, de l’immersion dans les coulisses d’un tournage de film de zombies sur lequel de véritables morts vivants finiraient par se manifester.

On se moque facilement là de ce qui parait être un film raté, extrêmement mal joué et où tout déraille. Un scénario où on ne comprend en plus pas toujours grand-chose. C’est d’ailleurs là que réside le défi du spectateur… tenir, résister, et ne pas succomber à l’envie de rebrousser chemin. Et c’est là que s’ouvre un autre chapitre, lui-même séparé en deux, qui nous projette en arrière vers un récit encadrant permettant d’expliquer à la fois la production et les conditions du tournage de ce fameux plan-séquence.

Plusieurs niveaux spatiaux et métaphoriques

La satire du milieu (producteur cynique, acteur arrogant, désorganisation générale) fonctionne plutôt sympathiquement, mais c’est surtout le tournage lui-même qui s’avérera véritablement jubilatoire, puisqu’il permettra de donner toutes les explications aux manquements du premier film visionné.

Tout prend sens alors… c’est la même histoire qui se répète mais vue des coulisses en quelques sortes. Et là, difficile de résister aux éclats de rires naturels. Le récit se déploie alors sur plusieurs niveaux spatiaux et métaphoriques. Il investit les hors-champs pour nous donner une vue plus large et se ponctue des interventions verbales et musicales absolument hilarantes de Jean-Pascal Zadi, qui joue le rôle du compositeur musical complètement perdu par la situation (tout en étant plutôt très bon finalement dans sa performance !).

Tout n’est évidemment pas léger, et on pourra certainement reprocher l’excès qui flirte avec la farce grotesque bien souvent. Mais l’essentiel est évidemment ailleurs : en donnant accès aux coulisses, Hazanavicius s’offre un véritable hymne au cinéma ou, encore mieux, une déclaration d’amour, là où on ne l’attend pas.

Il prend plaisir à nous dévoiler la fourmilière qui se met en marche derrière les caméras, emballé dans le mécanisme extraordinaire de l’illusion. C’est un hommage aux gens qui fabriquent des films, les acteurs, les réalisateurs, mais aussi les techniciens, les stagiaires, tout le monde. Un hommage au cinéma en train de se faire, au métier du cinéma, au quotidien.

Coupez ! est également une touchante chronique familiale sur l’écran mais aussi dans la vraie vie puisque Michel Hazanavicius s’est entouré pendant le tournage en faisant jouer à la fois sa femme, Bérénice Béjo, et sa fille, Simone Hazanavicius, autour de Romain Duris qui incarne la figure paternelle jouant un réalisateur, sorte d’alter égo du cinéaste français.