Si le suicide des adolescents est une véritable tragédie dont hélas on ne se préoccupe sans doute pas suffisamment, cette question revient pourtant actuellement sur le devant de la scène « internet », étonnamment au travers d’une série TV, « 13 reasons why » diffusée par Netflix.
Il faut savoir que le suicide est la première cause de mortalité chez les adolescents. Mais en plus le nombre de suicides dits « réussis » est sans commune mesure avec le nombre de passages à l’acte suicidaire dont la fréquence est au moins trente fois supérieure. Cependant, toute tentative de suicide révèle toujours une souffrance psychique. Chez un adolescent ce n’est jamais une conduite anodine à mettre sur le compte d’une « crise d’adolescence ». Elle ne doit jamais être banalisée, si minime soit-elle dans sa dangerosité.
Depuis le début du mois d’avril, Netflix diffuse une série intitulée 13 reasons why, une adaptation du roman 13 raisons de Jay Asher. Et cette série est en train de faire le buzz, de devenir le phénomène du moment. Son succès a été si fulgurant qu’elle figure parmi les sujets les plus repris sur les réseaux sociaux aux Etats unis et commence à faire beaucoup parler en France aussi… Des micros blogs se créent et les forums abondent autour de la série mais plus largement autour de la question du suicide des ados.
L’histoire commence juste après le suicide d’Hannah Baker, une élève de première dans un lycée américain ordinaire. Mais on découvre que la jeune femme, avant sa mort, a enregistrée 7 cassettes audio, et chaque face raconte l’une des raisons de son acte… pointant du doigt ainsi les personnes qu’elle considère responsables de son mal-être… et de sa mort.
La première chose à relever est sans doute que la série est excellente. Originale par la forme, très bien produite, réalisée et jouée, elle réussit à captiver le spectateur très vite pour ne plus le lâcher jusqu’à la fin de la saison. Mais le sujet qui nous intéresse là va au-delà de ces simples critères. Cette série traite de sujets lourds, difficiles et prégnants dans notre monde contemporain. Et l’on peut dire que le point extrêmement positif est que la série a touché le public par la façon intelligente et sensible dont elle traite la période transitoire de l’adolescence. Elle met en avant différentes problématiques sociales qui ne sont pas souvent abordées, telles que le suicide donc, mais aussi le voyeurisme, les attouchements, les rumeurs, le viol ou le harcèlement scolaire. Elle a également séduit par sa volonté de représenter différents milieux sociaux en mettant notamment en avant des personnages plus profonds qu’ils n’y paraissent. Au-delà du mal-être d’Hannah, la série nous immisce dans l’intimité de ses camarades, de sa famille, qui, malgré leurs erreurs qui ont contribué à la tragédie, ne sont pas diabolisés. Le sentiment de solitude et d’isolement d’Hannah crève évidemment l’écran. Et cette série devient donc une aide à la parole, elle délie les bouches sur des sujets souvent tabous. Il y a alors un côté éducatif qui apparaît, une sorte d’aide à la prévention sans doute dans tout ça.
Mais d’un autre côté, 13 reasons why peut sans doute aussi mettre parfois mal à l’aise. El les avis de spécialistes divergent sur le bien-fondé ou non de la série. Certaines associations impliquées dans ces questions ont quelques inquiétudes. Le risque d’identification notamment, avec entre autre la scène du suicide… l’effet culpabilisant derrière ces fameuses cassettes et ce qu’elles révèlent et une certaine approche fataliste de la situation.
Pour conclure, comme tout ce qui touche à des sujets aussi difficiles, il y a besoin sans doute d’une certaine vigilance dans la façon d’aborder 13 reasons why MAIS… surtout, besoin de réentendre là l’importance de ne pas faire de ces sujets des tabous que seul des spécialistes peuvent traiter. Il faut en parler ! C’est vital… et c’est le cas de le dire là, en l’occurrence. Et puis, tout cela révèle encore un peu plus une vraie désespérance profonde qui hélas est beaucoup trop présente et qui fait des ravages dans nos sociétés contemporaines, en particulier chez les jeunes. Alors, tout ce qui peut aider à la combattre est bon, il me semble. Et nous pouvons tous devenir aussi acteur de ce combat, en particulier si la foi en nous façonne une espérance solide et sûre.