Pierre Boulez avançait toujours vers le podium du chef d’orchestre d’un pas décidé, rapide, animé d’une grande intensité, mais souple, on oserait dire décontracté. D’un geste économe et sans baguette – une exception qui fit causer mais qui n’avait rien de sorcier, juste un choix – l’artiste faisait surgir une musique de grande clarté, sensuelle en diable. Avec ça, un homme accessible, de grande gentillesse, démocrate à bien des égards, à cent lieues des bêtises colportées par les ignares à son endroit. Bien sûr, il avait ses têtes et ne manquait pas de formuler des jugements parfois rudes au sujet des compositeurs de jadis. Mozart ou Beethoven par tempérament, Mendelssohn par goût, n’ont pas fait partie de son répertoire ; et c’est peu dire que sa Symphonie fantastique n’a pas laissé un souvenir impérissable. Mais pour le reste, de Wagner à Bartok en passant par Mahler, Stravinsky, Debussy, Ravel et Berg, il nous a livré des interprétations de légende.
Animé par la passion de permettre aux mélomanes de disposer d’un véritable paradis, l’artiste s’est battu pour […]