Le musée du Luxembourg expose aujourd’hui les chefs-d’œuvre du cabinet d’art de Dresde, constitué et complété du XVIe au XVIIIe siècle avec passion par plusieurs générations de princes électeurs de Saxe. Une centaine d’objets exceptionnels ont été rassemblés et répartis en sept salles pour un parcours où le visiteur ira de surprises en émerveillement.

Science et religion

C’est en Saxe que se sont d’abord répandues les idées de la Réforme. Dès l’origine, à partir de Wittenberg qui était sur leurs terres, Luther a été protégé par les princes électeurs qui se sont ensuite convertis au protestantisme. L’intérêt des souverains pour les idées nouvelles ne se borne pas à la religion mais se porte aussi sur les sciences : ils ont tenu à compléter, chacun selon ses goûts et centres d’intérêt, les collections qu’ils ont été parmi les premiers à constituer en Europe. La première salle entraîne d’emblée dans la recherche d’une plus juste représentation du monde avec de nombreux instruments de mesure et un très beau globe terrestre. La révolution copernicienne, qui détermine que la Terre tourne autour du Soleil et non l’inverse, remet en cause toutes les certitudes jusque-là admises en Occident.

Mondes lointains et inconnus

Le cabinet de curiosités est aussi, comme son nom l’indique, un lieu où se trouvent rassemblés des objets étranges, inconnus ou fantastiques, provenant souvent de contrées tout juste découvertes. Coquillages extraordinaires, ivoires sculptés, bézoard aux vertus magiques et dent de narval (attribuée à la mythique licorne) étaient autant de trésors très recherchés dont des exemplaires ont été prêtés pour l’exposition. Souvent admirablement retravaillés par les artistes (dans les pays d’origine ou en Europe), ils sont sertis et enrichis de manière à exciter encore plus l’intérêt des visiteurs chanceux admis à les admirer au cours des siècles.

Le goût des princes de Saxe s’est porté aussi sur la porcelaine de Chine ou du Japon, dont les secrets de fabrication, une fois percés, ont donné naissance à la première manufacture européenne à Meissen (non loin de Dresde) en 1710. Enfin, la dernière salle est consacrée aux collections du cabinet turc particulièrement enrichi par Auguste le Fort, prince de Saxe et roi de Pologne (1697-1733), qui était fasciné par l’Empire ottoman, pays ennemi mais aussi riche civilisation ; lui-même se plaisait parfois à s’habiller en sultan.

Célébrité européenne

Les collections d’art de Dresde ont assuré à la ville une renommée internationale. Ces cabinets de curiosités étaient en effet un signe de puissance, reflet de la richesse et du pouvoir des princes à qui ils appartenaient. Leur idéal était de reproduire l’ordre du monde créé par Dieu à travers les objets de la nature, de l’art et de la science. C’est aujourd’hui pour le visiteur contemporain l’occasion de comprendre l’évolution des centres d’intérêt et de la compréhension du monde depuis cinq siècles en Europe.