Il y a 150 ans, en 1872, Monet a peint son célèbre tableau Impression, soleil levant, qui donna son nom au mouvement impressionniste et qui est la star du musée Marmottan. À l’occasion de cet anniversaire, le musée a souhaité organiser une exposition transversale autour de la représentation du soleil, avec une centaine d’œuvres soigneusement sélectionnées datant de l’Antiquité à nos jours.
Du dieu créateur à l’objet créé
Indispensable à la vie, le soleil a été considéré comme divinité créatrice dans de nombreuses civilisations dès la préhistoire. Le musée expose des représentations égyptiennes et grecques, sur des vases (très bel Apollon sur son char) et des statues, qui soulignent l’importance de son culte et parfois aussi la frayeur devant sa possible disparition en hiver.
Avec l’arrivée des religions du Livre, l’attention se déporte car il est relégué désormais parmi toutes les créations de Dieu pendant les six jours racontés dans la Genèse. Le soleil devient non plus le sujet de l’œuvre, mais un détail situé dans un angle de la composition, comme on peut le voir sur des miniatures médiévales.
À la Renaissance, nouvel intérêt pour le soleil grâce au développement des sciences et à la révolution copernicienne. Désormais centre de notre système solaire, les artistes lui font de nouveau une place majeure, cultivent les allégories et reprennent des thèmes antiques comme le mythe d’Icare. Le développement de l’absolutisme en France s’illustre avec les représentations de Louis XIV en Roi-Soleil dispensateur de tous les bienfaits pour ses peuples.
Fascination et crainte
La suite de l’exposition est consacrée aux représentations à portée scientifique, comme lorsque les artistes sont sollicités pour représenter des phénomènes exceptionnels, par exemple la grande éclipse lunaire de 1714 où la Terre est alignée avec le Soleil et la Lune.
À partir de la fin du XVIIIe siècle, c’est le romantisme qui apparaît et introduit une nouvelle vision, expression d’une relation particulière de l’homme avec l’infini. C’est frappant dans plusieurs tableaux exposés de croix dans les bois, mystérieuses et illuminées par le soleil dont les rayons sont opportunément dirigés. Un mysticisme également présent dans le tableau de Caspar David Friedrich sur le matin de Pâques, où les femmes immobiles sur le chemin sont minuscules, dominées par un soleil à la lueur pâle et rosée.
Les impressionnistes et leurs successeurs font une nouvelle place au soleil en déconstruisant ses couleurs jusqu’à en faire le sujet unique du tableau, objet fascinant d’une vision parfois hallucinée comme chez Arthur Dove en 1935. Envahissant, il devient même inquiétant dans certaines œuvres contemporaines. Ce n’est plus seulement l’astre pourvoyeur de vie mais aussi destructeur, ce qui peut faire écho avec les inquiétudes contemporaines sur le réchauffement climatique.
Une étoile parmi des millions d’autres, le Soleil ? Du point de vue astronomique certainement, mais une source inépuisable d’inspiration pour nous autres humains qui bénéficions de son rayonnement.