Plutôt qu’un biopic sur une virtuose de l’art brut, c’est l’histoire d’une femme énergique mais fragile qui n’a pas réussi à vivre. Ainsi le récit est-il fait de multiples scènes accompagnant Aloïse de la petite enfance au tombeau. Sa jeunesse à Lausanne, sans mère, est placée sous le signe du refus. Douée d’une forte personnalité, elle vit une révolte permanente, refusant le destin qu’elle redoute de se voir imposé par sa famille, l’école et l’Église.
Dans le 1er tiers du film, la jeune Aloïse rêve de devenir cantatrice, mais sa voix ne cesse d’être couverte par celles de son père, d’un prêtre, et de son soupirant. Expédiée alors comme gouvernante en Allemagne, elle doit renoncer à ce rêve, et une 2ème Aloïse apparaît, tout aussi rigide, mais qui semble petit à petit s’absenter d’elle-même et de son environnement, avec parfois de grands moments d’exaltation. La guerre l’arrachera à sa famille d’adoption et la précipitera dans la psychose et un internement de près de 40 ans.
Cette 2ème partie du film, la plus longue, est marquée par le retour incontrôlé du corps -brusques éclats de gestes et de voix auxquels succède un soudain mutisme. Dès lors Aloise va continuellement dériver de plus en plus loin des autres, dans l’espace clos et le temps arrêté de l’asile, et passer le plus clair de son temps à dessiner et à peindre dans le registre de l’art brut. L’acte de création lui-même n’est cependant peu ou pas filmé.
Cette création libératrice se voit rapidement entravée par des dispositifs de contrôle physiques, les injonctions des soignants et le dogmatisme du professeur d’arts plastiques, que combat cependant l’humanisme du directeur de l’établissement, un précurseur de […]