Ce film est une fable réaliste que n’aurait pas désavoué La Fontaine. Malgré le ton badin et bonhomme qu’ont choisi les deux réalisateurs complices, elle est à la fois éclairante et désespérante : oui ! les classes sociales existent ; non ! on ne peut pas « réinsérer » les riches. Sur le modèle du magazine Vis ma vie de TF1, Sarah Saldmann, une chroniqueuse télévisée ultra-libérale, hors sol et caricaturale dans ses propos, va accepter de partager pendant une semaine la vie d’un bel échantillonnage de travailleurs de l’ombre. Ces brefs compagnonnages concernent parmi d’autres Amine chauffeur livreur lyonnais, Ked à la découpe de poissons, Louisa, auxiliaire de vie stéphanoise qui touche 1.000 euros par mois, Nathalie, femme de chambre longtemps éloignée de l’emploi après des maladies professionnelles, Elie agriculteur dans le Morvan, ou Haroon un cuisinier afghan ; autant de héros ordinaires et trop souvent privés de dignité auxquels sont données ici la parole et une visibilité.
La force du témoignage de ces femmes et de ces hommes constitue une forme de cinéma-vérité car il est clair qu’eux au moins ne jouent pas, ils ont à cœur d’apporter un démenti à tous les discours méprisants sur les assistés, les fainéants et les profiteurs jusqu’à l’apothéose d’une scène finale chaleureuse et drôle qui singe la cérémonie […]