Un dénommé Karl vient, sur contrat, d’exécuter un bistrotier. Le commanditaire de l’assassinat, un certain Monsieur Paul, propose au jeune homme, une autre exécution. Cette fois-ci la victime qui se prénomme Kate et qui habite dans une vaste demeure au bord de l’eau, va rapidement exercer une étrange fascination amoureuse sur le tueur.

« Les films sont des actes poétiques avant d’être des spectacles », telle est la profession de foi de ce cinéaste autobiographique rongé par le spleen. Son 5ème opus, où se rencontrent pour une passion romantique fugitive, un jeune homme de vingt-cinq ans, Karl, et une femme à la maturité épanouie, Kate, en est l’illustration éclatante. Le film s’ouvre dans les flonflons et les lumières d’un soir de fête. Deux tueurs à gages, Karl et son ami Roland, voyous à gueule d’ange, pénètrent dans le jardin enchanté de la belle villa de Kate pour la supprimer.

Il faut cependant oublier ce suspense car c’est une fausse piste. En effet, comme au cours d’un rêve, le long d’un fleuve et au milieu des fleurs, Karl tombe mystérieusement sous le charme de Kate, et dès lors c’est un temps suspendu qui distille le poison vénéneux qui ensorcèle ces fragiles personnages. Karl, prisonnier perdu d’une bande, découvre l’amour fou tandis que l’inconstante Kate, hantée par la fuite inexorable du temps et la précarité de son image, se hâte de jouir, consciente que son jardin des délices va basculer comme dans le rêve récurrent de Karl.

De fait le piège se referme sur eux et après quelques jours et quelques nuits passés ensemble, Kate le rejette brusquement. Karl quitte la maison, et terrassé par la douleur tente d’approcher à nouveau Kate qui refuse de lui parler et de le voir. Rendu fou de désespoir il la tue : le crime crapuleux prémédité s’est mué en un crime passionnel inéluctable.

De ce très beau film d’amour et de mort, où chaque plan est à contempler, émane un parfum doux-amer qui peut évoquer au spectateur le sortilège du conte envoûtant que fut Les visiteurs du soir scénarisé par Jacques Prévert. Delphine Seyrig, belle héroïne ambiguë et fatale, à la féminité fragile et […]