1943, la Shoah ravage l’Europe ; en France, les Juifs sont pourchassés et livrés à l’occupant ; la police de Vichy applique les lois raciales passées par un gouvernement collaborateur. Partout les Juifs sont persécutés, arrêtés, déportés, internés. Partout sauf dans quelques terres de refuge dont le Chambon sur Lignon, communauté protestante de Haute Loire où tous les habitants, unis autour de leur pasteur donneront le gite et le couvert à plusieurs milliers de réfugiés dont de nombreux enfants, Juifs pour la plupart. Le dimanche, au temple, le pasteur André Trocmé prêche la liberté, l’hospitalité envers l’étranger, la non-violence, la résistance du chrétien à la loi de César quand celle-ci est inique. L’Église de neige, c’est sa paroisse et celles de ses collègues, dans la montagne hivernale : c’est aussi le titre de ce recueil.
Car le pasteur est un conteur, qui donne le meilleur de lui-même dans ces Noëls organisés dans le temple, autour d’un grand arbre rapporté de la forêt voisine. Ses contes ont conservé une valeur universelle et actuelle. On les lit comme des paraboles mises à la portée des enfants, pour leur apprendre leur futur métier d’hommes et de femmes libres. Conter, avec Trocmé au Chambon, c’est encore résister. Dans le conte éponyme de ce recueil, le Maître intime aux « Grands » (qui représentent les forces occupantes) : « Vous avez bâti une forteresse énorme et vous avez détruit les chefs d’œuvre des autres. Allez voir ce qu’il reste de votre forteresse. » Et les Grands étant allé voir ne trouvèrent rien, rien que le Néant. Quel courage pour André Trocmé de publier, en 1943, une condamnation si claire de la force aveugle et d’entretenir l’espoir d’une civilisation plus humaine.
Le livre aux éditions Ampelos
André Trocmé : L’Eglise de Neige
André Trocmé a été pasteur du Chambon-sur-Lignon de 1934 à 1948. Il a été nommé Juste des nations, comme son épouse Magda, le couple des Theis, Roger Darcissac et d’autres habitants de la région. L’Église de neige, publié fin 1943, n’avait jamais été réédité. Cette réédition est préfacée par Patrick Cabanel qui décrypte le rôle des pasteurs dans la résistance non violente et la symbolique des « contes pour résister » ; un avant-propos de Nelly Trocmé Hewett qui évoque la vie au Chambon pendant ces les années-là complète le volume.
Prix public : 15 euros