« Quand ils sont venus chercher les communistes, je n’ai rien dit, car je n’étais pas communiste,
Quand ils sont venus chercher les juifs, je n’ai rien dit, car je n’étais pas juif ……
Et quand ils sont venus me chercher, il n’y avait plus personne pour protester. »
Cette citation du pasteur allemand Martin Niemöller est l’un des rares extraits de sa pensée connus en France. Formulée en 1946, elle concerne à l’origine les nazis, et elle exprime à la fois « un regret tragique, une forme de repentance, et une prise de position ferme et résolue en faveur d’une vie pour les autres ».
Aussi ce livre de Frédéric Rognon vient combler un manque regrettable, d’autant que la vie de ce pasteur (1892- 1984) nous interroge encore aujourd’hui, de façon dérangeante, sur le sens de la vie pour un chrétien.
Dans ce livre, l’auteur s’efforce de nous présenter de façon cohérente l’itinéraire « heurté » de la longue vie de Martin Niemöller. .Il est ainsi amené à distinguer quatre ou cinq périodes dans son parcours.
C’est d’abord la période du jeune Niemöller, militaire et nationaliste, qui connaît en particulier une prise de conscience aiguë du mal dans l’expérience de la guerre (Officier dans un sous-marin il refuse de torpiller un bateau ennemi qui portait secours à des naufragés).
C’est ensuite le début de son ministère pastoral dans la paroisse de Dahlem, une commune près de Berlin. Peu à peu il prend de la distance vis-à-vis du nazisme, en s’opposant à la mainmise de ce parti sur l’Église protestante allemande. Il sera alors l’un des fondateurs, avec Dietrich Bonhoeffer, de l’Église Confessante allemande qui, en marge de l’Église protestante officielle, affirmera par la déclaration de Barmen (1934) son refus des compromissions avec les pouvoirs établis.
C’est encore la détention de Martin Niemöller à partir de 1937 jusqu’à la fin de la guerre en 1945 dans le camp de concentration de Sachsenhausen , puis dans celui de Dachau . Il y affronte des conditions très pénibles, voire inhumaines, que sa foi seule lui permet de supporter : Il s’en est suivi en particulier un changement de regard sur ceux qu’il considérait avant comme des ennemis, par exemple ses geôliers.
Vient ensuite la période de l’immédiat après- guerre (1945-1948) où, tel un prophète, Martin Niemöller appelle l’Église protestante allemande, et plus généralement le peuple allemand, à confesser leur culpabilité devant l’immense souffrance que ce dernier a provoquée. Il souligne notamment la forme de pêché par omission de l’Église car elle n’a pas protesté quand elle a connu l’existence des camps de concentration; il dénonce plus généralement la non-reconnaissance de sa faute par la plupart des Allemands qui n’auraient fait qu’obéir aux ordres. Et Niemöller encourage les chrétiens à une repentance […]