Sam Philips, le fondateur de Sun Records – producteur qui a également découvert Elvis, Howlin’ Wolf, Johnny Cash, Carl Perkins et Roy Orbison – a dit de Lewis qu’il était « l’homme le plus talentueux avec lequel j’ai jamais travaillé, qu’il soit noir ou blanc… l’un des êtres humains les plus talentueux à avoir foulé la terre de Dieu ». Il restera comme l’un des pères fondateurs du Rock’n’Roll, un artiste génial ayant vécu une vie entre deux eaux, happé par les très hauts-fonds de l’enfer et rappelé sans cesse par des hymnes paradisiaques aux relents de sa foi d’enfant.
Jerry Lee Lewis est né le 29 septembre 1935 à Ferriday, en Louisiane. À 9 ans, il découvre, avec son cousin Jimmy Swaggart, le piano de l’Église pentecôtiste que fréquentent ses parents, de pauvre condition, qui finalement hypothèquent la ferme familiale pour lui en payer un.
Jerry grandit avec la foi chrétienne chevillée au corps. Il part se former au Texas, au Southwest Bible Institute, pour devenir pasteur, mais il se fait finalement renvoyer pour, selon lui « avoir joué My God Is Real à la sauce boogie-woogie », qu’il maîtrise déjà avec un certain talent.
En 1956, il prend alors la direction de Memphis (Tennessee), véritable capitale de la musique américaine de cette époque. Rapidement il signe avec la célèbre maison de disque Sun Records, toute nouvelle à ce moment-là. Sa rencontre, cette même année, le 4 décembre, avec Elvis Presley, Johnny Cash et Carl Perkins offre une séance d’enregistrement mémorable et connue sous le nom de Million Dollar Quartet. Ils interprètent des hymnes chrétiens au piano dans les studios de Sun Records.
Jerry Lee Lewis racontera, plus tard en 2011, qu’Elvis Presley cherchait son soutien parce que Johnny Cash et Carl Perkins étaient baptistes, et qu’ils ne connaissaient pas les paroles aussi bien qu’eux deux, qui étaient pentecôtistes.
Nous sommes encore dans les débuts du rock et Jerry Lee Lewis y trouve une place de tout premier choix. Les foules se pressent pour le voir marteler férocement le clavier avec toutes les parties possibles de son corps, tandis qu’il balance son tabouret sur un pas de danse endiablé. « Si je vais en enfer, j’irai en jouant du piano », aimait dire ce provocateur jusqu’à même incendier son piano à la fin d’un concert, amplifiant sa réputation de « bad boy » du Rock’n’Roll.
C’est Great Balls of Fire, qui le propulse au sommet des hits et fait de lui l’une des stars les plus adulées du moment. Fantasque et parfois même violent, addict à l’alcool et aux drogues, sa santé en pâtira et il connaîtra de sérieuses démêlés avec la police. Côté cœur, Lewis s’est marié sept fois. Il était autant célèbre pour ses tubes que pour les drames et scandales qui ont jalonné son parcours. Mais qu’importe, et au contraire même finalement, sa légende s’écrit… Jerry Lee Lewis a remporté plusieurs disques d’or, des Grammy Awards et il devient l’un des tous premiers artistes intronisés au « Rock and Roll Hall of Fame » (Cleveland, Ohio), à sa création en 1986.
C’est en février 2020, après plus d’un an passé à récupérer la motricité de sa main droite suite à un AVC, que Jerry Lee Lewis est entré en studio, pour enregistrer un album gospel. La boucle est bouclée. Ses 85 ans seront l’occasion d’un show exceptionnel le 28 octobre de cette même année. On y croisera de grands noms tels qu’Elton John, l’ancien président Bill Clinton, Willie Nelson, Lee Ann Womack, Tom Jones, Joe Walsh, Keith Richards et d’autres. Lui y apparaissait souriant, tranquillement installé dans un fauteuil aux côtés de ses proches. Parmi eux, ses célèbres cousins : le télévangéliste Jimmy Swaggart et Mickey Gilley, artiste country. Il n’a pas joué lors de cette soirée spéciale, laissant aux autres interpréter ses plus grands succès.
Dans ses vieux jours, il chercha à retrouver la paix avec Dieu. Il disait par exemple : « Je ne veux surtout pas aller en enfer. Si je pouvais refaire ma vie, je changerais beaucoup de choses, non pas pour l’approbation des hommes, mais pour la grâce de Dieu. »