Présenté en mai dernier à la Quinzaine des Réalisateurs de Cannes, le film s’était vu décerner le prix SACD. Une façon d’inverser les couplets chantés par Ferrat pour le rejoindre dans le refrain.

Deuxième long métrage du cinéaste Thomas Salvador, coécrit par Naïla Guiguet et Thomas Salvador, La Montagne nous présente Pierre, ingénieur parisien, qui se rend dans les Alpes pour son travail. Irrésistiblement attiré par les montagnes, il s’installe un bivouac en altitude et décide de ne plus redescendre. Là-haut, il fait la rencontre de Léa et découvre de mystérieuses lueurs.

Dans sa première moitié, La Montagne raconte comment Pierre expérimente ce que l’on pourrait qualifier d’ »appel » et fait le grand saut qui changera radicalement sa vie, en tous points. C’est d’abord le difficile apprentissage qui accompagne ce choix, passant ici par la neige et le froid…

Le suspense plane indirectement dans cette première partie. Où et quand les choses vont-elles basculer ?

Car oui, on ne peut imagine en rester là, sur un changement de vie, quelque chose de très en vogue d’ailleurs depuis la pandémie (même si le réalisateur confie avoir écrit son scénario bien avant). Et puis, il y a ce soupçon de romantisme extrêmement raisonnable, il faut l’avouer, dans la rencontre avec cette femme, Léa, jouée par Louise Bourgoin, avec qui se noue lentement une relation. C’est en quelque sorte ce qui nous fera entrer dans la suite, car ce n’est qu’une petite portion de l’histoire, le reste étant consacré à sa fondamentale relation. Celle avec la montagne. Une relation qui prend une forme toute particulière, déroutante, avouons-le, mais finalement assez magique ! Une nuit, alors qu’il se promène, il remarque une sorte de lumière qui rebondit dans les rochers. Il ne peut s’empêcher d’enquêter et découvre quelque chose à l’intérieur. Cette découverte et ce qui se passe ensuite, plein de poésie et d’allégories, nécessitent de rester silencieux, et d’offrir la découverte au spectateur devant le grand écran…

Avec La Montagne, Thomas Salvador nous propose une œuvre assez magnifique, en tout cas très émouvante et pleine de sensibilité, voire d’humilité.

Fable écologique certes, hymne à la nature, comme une réécriture contemporaine de Walden ou la Vie dans les bois d’Henry David Thoreau, en termes de libération de l’homme de la société « industrialisée » (et même déjà robotisée, dans le cas présent), mais aussi en raison de sa conscience écologique et du lien de l’homme avec la nature. Mais, La Montagne est à voir aussi comme une forme de manifeste politique (au sens propre du terme) où l’ouverture de nos cœurs l’emporte sur les conventions sociales établies, où le droit de répondre à un appel peut s’entendre et résonner au plus profond de nous, où accepter la découverte et la rencontre même avec l’inconnu est possible pour oser franchir (tous) les obstacles…