Qui est Abel Trem ? C’est un jeune lycéen hongrois, un peu mollasson, très cossard, attachant dans sa fragilité et ses ballades solitaires à vélo, un peu amoureux aussi (ça n’aide pas forcément dans le quotidien), et pas mal terrorisé par son père.
Qu’on rassemble tout ça dans un godet, qu’on secoue et qu’on jette les dés, et on conçoit bien qu’à l’arrivée, le jour de l’examen, malgré toute la bienveillance manifestée par les professeurs (et Dieu sait s’ils en mettent, les professeurs, de la bienveillance et de la compréhension !), en particulier celui d’histoire, son examinateur direct, l’échec soit inévitable. Et on conçoit tout aussi bien qu’il soit ensuite impossible à Abel, face à son père, de reconnaître qu’il est le responsable de ce résultat désastreux. Et le jeune homme de se mettre à mentir en accusant son professeur de l’avoir scandaleusement sacqué parce qu’il portait au revers de sa veste un pin’s patriotique qui l’a fait passer pour un partisan d’Orban.
On ne plaisante pas avec la liberté d’opinion, et le père d’Abel va monter au créneau, et le proviseur va monter au créneau, et tout le monde va monter au créneau, cette fois le « pas de vagues » se transforme en tempête médiatique, avec une crête de la vague tirée encore plus haut par une jeune journaliste aux dents longues qui trouve dans cette affaire l’occasion rêvée de passer de pigiste à pro et aligne des »Unes » que toute la Hongrie s’arrache. […]