« L’art de la paix » se tient à Paris au Petit Palais, depuis le 19 octobre dernier et jusqu’au 15 janvier 2017. Alors ne tardez pas à vous y rendre…

Jean Giraudoux a dit que « La paix, c’est l’intervalle entre deux guerres ». On comprend donc aisément ce choix d’intituler cette exposition « L’art de la paix ». On préfère généralement utiliser l’expression « art de la guerre » mais pourtant le défi est encore sans doute plus grand dans cette autre perspective, jusqu’à y voir une certaine dimension artistique. Reconnaissons malgré tout que le vocable est un peu exagéré si l’on considère un certain nombre des documents présents qui ne sont pas tous très glorieux… mais les œuvres picturales ou sculptures renforcent inévitablement cette dimension présente dans l’intitulé.

Très concrètement, c’est une exposition ambitieuse et inédite qui est proposé dans ce bel écrin qu’est le Petit Palais par Le ministère des Affaires étrangères et du Développement international : Quarante traités et une soixantaine de documents issus des archives diplomatiques choisis parmi les plus emblématiques de l’histoire des relations internationales de la France et présentés la première fois au public. À leurs côtés, des peintures, des sculptures, du mobilier, des objets d’arts précieux et des archives filmées de façon à les replacer dans leur contexte historique et permettre, par ailleurs, de mieux les comprendre en dévoilant le processus de leur négociation. Au total, ce sont près de 200 œuvres, du Moyen-âge jusqu’à nos jours, qui jalonnent le parcours de l’exposition autour de cinq sections thématiques. La scénographie alterne des moments spectaculaires d’un point de vue visuel et des sections plus historiques. Il faut aussi reconnaître la réussite de l’approche pédagogique est un élément fondamental. Deux dossiers pédagogiques sont d’ailleurs proposés pour les groupes scolaires ou étudiants (un premier pour l’accompagnateur et un autre pour l’élève).

Paradoxe… C’est par la guerre que tout commence (peut-être pour faire écho à Giraudoux). Une tapisserie de la Renaissance représentant une armée en marche fait écho à une immense toile représentant des Poilus enterrant un de leurs camarades, à une période indéfinie mais d’une tristesse, infinie, pendant la Première Guerre mondiale. Or cette guerre si violente, si désespérante, sert de rappel à son pendant lumineux : la paix ! L’exposition s’ouvre alors sur de grands conflits et leurs résolutions par des alliances, souvent matrimoniales. Des pièces d’archives exceptionnelles sont accompagnées de tableaux comme celui de Sebastiano Ricci commémorant la réconciliation de François Ier et de Charles Quint sous l’impulsion du pape Paul III.

L’exposition se poursuit par une galerie de grandes peintures du XVIIe au début du XIXe siècle célébrant la Paix de manière allégorique. La troisième section aborde la question des règles et protocoles à suivre pour faire la paix. En effet, le métier de diplomate se professionnalise avec le temps et diverses techniques de négociation apparaissent. Un certain nombre de rituels et de pratiques sont systématisés au XIXe siècle : l’élaboration commune des documents, l’échange de présents et un art de la table au service de la diplomatie, avant l’émergence d’un droit public international. Des objets exceptionnels, comme la Table de Teschen dite « Table de la paix » récemment acquise par le Louvre, sont ici présentés ainsi que des tableaux de Philippe de Champaigne, Jean-François de Troy…

Autre temps fort de l’exposition, la « chambre des trésors » qui dévoile ensuite un florilège de documents diplomatiques choisis pour leur exemplarité ou pour leur somptuosité. Reliures de velours ornées avec des broderies de fils d’or et d’argent, décors d’enluminures, boîtes à sceau ouvragé, certains traités sont de véritables objets d’art telle la lettre du roi de Siam à Napoléon III, gravée sur une feuille d’or. La dernière partie, après un rappel du rôle des penseurs de la paix depuis le XVIIe siècle, évoque l’émergence de l’opinion publique, les moments de paix illusoire (l’entre-deux guerres, la Société́ des Nations), le droit des peuples et la décolonisation, l’ONU puis, pour clore l’exposition et couvrir la période la plus récente, l’interdépendance irréversible de l’humanité́ : l’équilibre de la terreur nucléaire, les questions climatiques, la gouvernance mondiale. Cette dernière section rassemble des œuvres des XIXe et XXe siècles : un corpus important d’affiches de 1914 aux années 1970, des caricatures de Daumier entre autres, des œuvres de Monet, Picasso (La Colombe de la Paix), mais aussi des objets historiques comme le bureau de la signature du traité de Versailles…

Enfin, au milieu de ces œuvres parfois extraordinaires, je voudrai évoquer un livre d’une beauté saisissante La Cité de Dieu de Saint-Augustin qui est en soi une véritable œuvre d’art, un véritable trésor patrimonial. C’est un document fondateur de l’idée de la Cité, de la Cité céleste et de la Cité terrestre.

  • L’Art de la Paix. Secrets et trésors de la diplomatie, du 19 octobre 2016 au 15 janvier 2017, au Petit Palais, Musée des Beaux-Arts de la Ville de Paris, avenue Winston Churchill, 75008 Paris – Accessible aux personnes handicapées. Métro Champs-Élysées Clemenceau. RER Invalides. Bus 28, 42, 72, 73, 83, 93. Ouvert du mardi au dimanche de 10 à 18h. Nocturne le vendredi jusqu’à 21h. Fermé le lundi, 25 décembre, 1er janvier. Entrée payante pour les expositions temporaires : 10€. Tarif billet combiné 17€ qui donne accès à deux expositions temporaires de votre choix. Tarif réduit 7€. Gratuit jusqu’à 17 ans inclus, sur présentation de justificatif.