Le film est l’adaptation par Yvan Attal du roman de Karin Tuil, Les choses humaines, récompensé du prix Interallié et du Goncourt des lycéens 2019. Un film dans lequel le réalisateur s’est entouré de sa femme, Charlotte Gainsbourg, et de son fils, Ben, dans deux des rôles principaux.
Alexandre Farel, fils de Jean Farel, un journaliste connu du grand public, et de Claire Farel, essayiste féministe, est accusé de viol sur Mila Wizman. Cette dernière est la fille du compagnon de Claire. Mais les deux protagonistes ne partagent pas la même vision de cette nuit. L’un soutient son innocence, quand l’autre affirme avoir été violée. Mais qui a raison, qui a tort ?

Dans cette manière de faire, apparait clairement la complexité de la situation. Il y a bien sûr les zones grises du consentement – que l’on perçoit d’autant plus dans le temps du procès et des flashbacks proposés – mais aussi les dégâts qui s’opèrent dans les familles et chez Alexandre et Mila. Tout le monde reconnait d’ailleurs que le destin des deux jeunes gens engagés dans la machine judiciaire est profondément brisé. Celui d’Alexandre promis aux plus hautes fonctions et celui d’une jeune Juive, peut-être trop naïve ou simplement blessée intérieurement par un vécu compliqué, qui n’a pas sur dire « non » au moment voulu. On observe également les fractures provoquées par les rumeurs du tribunal médiatique (et en particulier par les internets) que l’on connait de nos jours. Soucieux de rester neutre, le réalisateur nous positionne, en quelques sortes, comme des membres du jury. La caméra d’Attal ne montre rien de ce qui s’est passé lors de cette soirée, comme dans le livre. La porte du local de nettoyage se ferme… point d’autres témoins que les deux jeunes seuls avec leurs expériences propres.

On se souvient aussi du geste de Pilate de se laver les mains, comme signe d’abstention (ce geste devenant même une expression aujourd’hui encore). Dans l’Évangile de Jean, il est notable que Pilate ne se lave pas les mains devant la décision qu’il a à prendre : Il sort et emploie une stratégie pour pousser la foule à décider elle-même ce qu’il espère secrètement. C’est une façon possible d’imaginer l’approche d’Yvan Attal car chaque spectateur repartira lui aussi en s’interrogeant avec, sans doute, sa compréhension des choses, son avis, son jugement même parfois. Alors, il reste de très bonnes images, d’excellents comédiens, une belle histoire… mais surtout il reste le fait que, dans la vraie vie, tout cela existe aussi si souvent et pose encore et encore cette même question : Qu’est-ce que la vérité ?
