Quand j’ai fait part à ma mère de mon projet d’écrire un livre sur Hugo, son visage exprima une intense émotion. Sans un mot, elle approcha une échelle de l’armoire de sa chambre à coucher et se mit à grimper. Elle resta un long moment, comme suspendue en l’air, avant de redescendre avec un dossier brun, rempli de documents. « Ils t’appartiennent, murmura-t-elle. Mon père les a apportés de Hongrie dans ses pérégrinations, sur les routes de l’exil ». J’étais frappée par l’étrange similitude du sort réservé aux souvenirs, relégués dans l’antre sombre, et celui de ces papiers, conservés au fond d’une armoire.
Muriel Klein-Zolty part sur les traces de son grand-père Hugo Fonyo, juif hongrois réfugié en France, disparu dans la Shoah. De Budapest, jusqu’en Alsace, en passant par Vienne et Paris, elle le fait surgir du néant et du silence. Entre reconstitution historique et quête impossible, elle raconte l’Europe de la première moitié du XXème siècle, ses cafés, ses théâtres et ses révolutions. C’est à Drancy, au seuil de l’innommable qu’elle abandonne son personnage. Dans cette recherche, elle l’a voulu vivant.
Docteur en sociologie, Muriel Klein-Zolty a enseigné la philosophie puis est devenue écrivain public-biographe. Elle est l’auteur d’ouvrages consacrés à la mémoire collective.