Le film retrace l’histoire de Roland, né en 1963 avec un pied-bot, et de sa mère Esther, une femme déterminée qui, contre l’avis général, lui promet une vie épanouie et sans entrave. Pour réaliser cette promesse, Esther déploie une énergie sans faille, défiant les obstacles et les préjugés. Cette quête de normalité et de bonheur se déroule sur plusieurs décennies, mêlant humour et émotion. 

Une mère à la fois aimante et envahissante

Leïla Bekhti incarne avec brio Esther, une mère à la fois aimante et envahissante, dont l’optimisme inébranlable illumine le récit. Jonathan Cohen, dans le rôle de Roland, apporte une profondeur touchante à un personnage confronté aux défis physiques et aux attentes élevées de sa mère. La narration se divise en deux parties : la première, située dans les années 1960, est une explosion de couleurs et de musique, reflétant l’effervescence de l’époque. La seconde, plus introspective, suit Roland adulte dans sa quête de sens et d’identité, avec la musique de Sylvie Vartan en toile de fond, renforçant la dimension émotionnelle du film. 

Le réalisateur canadien Ken Scott (Starbuck) tisse une réflexion profonde sur l’amour inconditionnel, la foi et la capacité de chacun à transcender les épreuves.

Une quête de sens comme une métaphore de l’amour divin

À travers cette histoire se dessine la figure d’une mère qui fait office de guide spirituel pour son fils. Dans ce portrait d’une relation mère-fils, nous assistons à une quête de sens marquée par des obstacles physiques, sociaux et personnels, mais soutenue par une forme de foi silencieuse. Esther est une femme pour qui l’amour maternel devient une sorte de transcendance. Elle incarne une foi qui n’a pas besoin d’être nommée ou institutionnalisée pour se manifester. Dès la naissance de Roland, handicapé par un pied-bot, Esther refuse d’accepter le verdict médical et les préjugés de la société qui condamnent son fils à une vie restreinte. Elle prend sur elle de le pousser à aller au-delà des limites que les autres lui imposent, presque comme une métaphore de l’amour divin qui ne connaît pas d’obstacles insurmontables, qui peut même déplacer les montagnes.

La spiritualité, dans ce film, ne se situe pas dans des rituels religieux ou des discours dogmatiques, mais dans l’attitude de cette mère qui se fait l’architecte du destin de son enfant.

Dieu, dans ce récit, est un fil invisible, mais palpable, qui relie chaque action d’Esther à une force plus grande qu’elle, à une croyance inébranlable dans le potentiel de Roland.

Cette dimension, subtilement suggérée, touche au cœur même du message chrétien : l’espoir contre toute attente, le refus de céder face à l’adversité, et l’amour sans condition.

Jonathan Cohen, dans le rôle de Roland adulte, traduit avec justesse le poids d’une vie façonnée par cet amour maternel hors du commun. En grandissant sous l’aile protectrice d’Esther, il devient une incarnation de la résilience humaine. Pourtant, il ne s’agit pas simplement de s’adapter à ses contraintes physiques. Le véritable enjeu du film est la question suivante : comment vivre librement, sans se sentir emprisonné par la dévotion de sa mère, aussi bienveillante soit-elle ?

Sylvie Vartan, figure salvatrice et symbole de l’évasion

Le choix d’inclure Sylvie Vartan, jouant son propre rôle, dans cette trajectoire personnelle et familiale, amène une dimension presque mystique à l’histoire. Pour Roland, la chanteuse devient une sorte de figure salvatrice, un symbole de l’évasion et de la possibilité d’un monde où les limitations s’effacent. Sylvie Vartan, avec son glamour et son charisme, est une icône pop mais aussi une projection des rêves de Roland : la promesse d’un au-delà de la souffrance, d’une vie plus vaste et plus lumineuse.

Tension entre le sacré et le profane

Au-delà des aspects humoristiques et dramatiques du film, c’est cette tension entre le sacré et le profane qui en fait toute sa richesse.

Le film pose, en filigrane, une question profondément spirituelle : qu’est-ce qui nous soutient vraiment dans l’épreuve ? L’amour humain peut-il remplacer ou transcender l’amour divin ?

Une foi agissante

À travers Esther, le spectateur est invité à réfléchir à une foi agissante, une foi qui ne se contente pas de prier, mais qui travaille à changer le cours des choses. Pour un public croyant, Ma mère, Dieu et Sylvie Vartan peut être vu comme une parabole moderne de la grâce et de la résilience.

La foi d’Esther, même si elle ne se revendique pas comme religieuse au sens strict, renvoie à cette idée d’un amour infini qui fait vivre et grandir.

Dans une société où la foi est parfois reléguée à l’arrière-plan, ce film rappelle que la spiritualité peut s’exprimer dans les gestes les plus simples et les plus quotidiens, et que les figures spirituelles peuvent parfois prendre aussi les traits d’une mère ou d’une icône pop.

Ken Scott signe ici une œuvre douce et lumineuse, mais qui ne manque pas de poser des questions fondamentales sur la transmission des valeurs, la foi en l’autre et la manière dont l’amour familial peut devenir un véritable chemin de résilience. À la manière d’une prière silencieuse, le film nous enseigne qu’il est possible de vivre pleinement, même avec des fragilités, et qu’en fin de compte, c’est peut-être cela, la plus grande forme de foi.