L’École préparatoire de théologie protestante a accueilli pendant près d’un siècle et demi (1846-1990), mille cinq cents jeunes gens environ, souhaitant accomplir des études de théologie en vue d’un ministère pastoral ou missionnaire. N’ayant pas le baccalauréat requis pour entrer dans l’une des Facultés de théologie protestante de langue française ou, jusqu’en 1970, à l’École de la Société des missions évangéliques de Paris, ils ont été pré- parés par l’École à atteindre ce niveau et à décrocher le fameux diplôme. L’École préparatoire a connu plusieurs périodes marquées par les mutations de l’Église et de la société. Ces mutations se sont traduites par des déménagements successifs entre différentes implantations en France.
Le bouleversement de Mai 1968
Née en 1846 à Lille, puis à Paris en 1852, où elle a véritablement été fondée, l’École préparatoire de théologie protestante a connu la plus longue partie de son histoire à Saint-Germain-en-Laye. Dans les années après guerre, le public des élèves commence à évoluer. Initialement conçue comme une école pour les vocations tardives, l’École reçut de plus en plus d’élèves ne se destinant pas nécessairement au ministère pastoral, et dont l’âge diminuait.
Les élèves devenaient de plus en plus des jeunes gens dont les projets d’obtention du baccalauréat avaient été simplement différés de quelques années. Face à cette mutation et à l’accroissement du nombre des élèves que cela représentait, l’École est déplacée en 1962 à Saint-Cyr-au-Mont d’Or, dans la banlieue lyonnaise. Déjà engagée dans un virage quant à son propre projet, c’est à Saint-Cyr que l’École va connaître le bouleversement de mai 1968.
Seule nuit des barricades de la ville
Mai 1968 a été vécu de façon plutôt paisible à l’École. En effet, beaucoup des revendications de 1968 étaient déjà mises en œuvre dans l’École, où un Conseil de maison regroupait enseignants, direction et élèves. Alors que les étudiants en théologie protestante des Facultés de Paris et de Montpellier étaient en grève, les élèves de Saint Cyr n’ont pas suspendu les cours. En revanche, un groupe d’élèves s’est rendu à Lyon le 24 mai, à l’occasion de la seule nuit des barricades de la ville. Trois jours plus tard, une réunion informelle à l’École réunit élèves et professeurs, avec le directeur Alain Blancy, pour réfléchir aux suites à donner dans l’École à ces événements et revendications.
Les quatre points proposés n’ont été finalement qu’un renforcement de ce qui se vivait déjà à l’École, grâce à une pédagogie innovante et à la vie communautaire : le dialogue élèves-professeurs-direction, la vocation culturelle de l’École, des commissions paritaires élèves-professeurs sur les programmes et le travail par petits groupes d’élèves. 1968 représente le sommet de la montagne de la vie de l’École, selon Jean-François Zorn.
Avec 46 élèves inscrits, elle est l’année où ils furent les plus nombreux. Au niveau pédagogique, au niveau de son projet même, 1968 symbolise également les mutations qui étaient déjà en cours et vont se conclure avec le dernier déménagement de cette institution, en 1974 à Montpellier, au sein de l’Institut protestant de théologie, alors qu’il n’y a plus que 16 élèves inscrits.
Jean-François Zorn, Une école qui fait date. L’école préparatoire de théologie protestante (1846-1990), éditions Olivétan, 2013, 342 p., 30 €