Cette fois-ci, Bond (Daniel Craig) a été tiré de sa retraite par l’agent de la CIA Felix Leiter (Jeffrey Wright) pour traquer une arme biologique qui tombe dans de mauvaises mains les unes après les autres. Cette arme est particulièrement infâme car la maladie qu’elle déclenche cible l’ADN d’une seule personne – ou d’une race entière. C’est un concept effrayant, presque réel, qui augmente les enjeux de la mission. Réticent à retourner sur le terrain, Bond doit également faire face aux retombées émotionnelles de sa relation avec Madeleine (Léa Seydoux), son ex-amour avec qui il est parti pour vivre heureux à la fin de « Spectre ».
Depuis Casino Royale, les films de Daniel Craig ont maintenu une ligne claire, s’appuyant sur l’histoire du personnage et menant à l’achèvement de l’arc de ce 007. Alors qu’auparavant, différents Bonds pouvaient aller et venir, sans que cela n’ait vraiment d’effet les uns sur les autres, ce qui se passe dans chaque film a ici son importance. L’histoire est d’ailleurs truffée de rappels aux précédents films de Craig, ainsi qu’aux anciens films de Bond, et s’appuie sur ces rappels avec des rebondissements et des développements de personnages cruciaux pour la narration, sans oublier quelques surprises majeures. Le réalisateur Cary Joji Fukunaga (True Detective, Ça, Jane Eyre) nous livre ce qui est sans doute le meilleur épisode depuis 2006, créant ainsi un ensemble parfait pour la fin de cette série. C’est aussi le film le plus long de la franchise, avec 163 minutes, mais rassurez-vous, une fois qu’il est lancé, il ne s’arrête pas et le temps passe extrêmement vite. L’action, quasi omni présente, est gérée de main de maître grâce au directeur de la photographie Linus Sandgren (First Man, La La Land) et porté par la partition du maitre Hans Zimmer. Avec ses poursuites en voiture, ses combats acharnés et ses nombreuses fusillades, le public féru de ce genre cinématographique ne pourra que se régaler. Époustouflant, certainement, mémorable également, ajoutez une montée d’adrénaline quasi ininterrompue, d’autant plus si, comme moi, vous le découvrez dans une salle immersive, façon 4DX ou Ice et avec les lunettes 3D sur le nez !
Ce Bond, le 25ème depuis le début de la franchise en 1962 avec Dr. No, est un régal pour de nombreuses raisons. Daniel Craig est à fond dans ce film et n’a jamais été aussi bon dans le rôle de l’agent du MI6. Après le décevant SPECTRE, il était important pour l’acteur de sortir du lot et de consolider son héritage en tant que l’un des meilleurs acteurs à porter les 3 chiffres emblématiques. Dans le film, le personnage doit faire face à de nombreux chagrins, et Craig excelle dans les parties dramatiques en plus de l’action. La chimie entre lui et Seydoux est parfaite, et il y a quelque chose de magnétique entre eux à l’écran. Seydoux, comme Eva Green dans le rôle de Vesper Lynd avant elle, ajoute beaucoup plus de profondeur aux James Bond Girls typiques du passé.
Christoph Waltz, un ajout de classe, bienvenu dans n’importe quel casting, revient dans le rôle de Blofeld, qui parvient toujours à atteindre Bond, même de derrière les barreaux, façon Hannibal Lecter. Pour cette dernière sortie de Craig dans le rôle de Bond, on retrouve aussi Ben Whishaw dans le rôle de Q, Naomie Harris dans le rôle d’Eve Moneypenny, Jeffrey Wright dans le rôle de Felix Leiter, et Ralph Fiennes dans le rôle de Gareth Mallory/M.
Mais la belle surprise, c’est sans doute la nouvelle venue en la personne de Lashana Lynch dans le rôle de Nomi, un autre agent du MI6 (nous n’en dirons pas plus)… Il est amusant de voir ces deux-là s’échanger des piques tout au long du film, alors qu’ils cherchent à se surpasser l’un l’autre. Et Ana de Armas est fantastique dans le rôle de Paloma, un autre agent de la CIA avec lequel Bond fait un court moment équipe lors d’une mission à Cuba. Elle est tout à fait remarquable pour ses talents d’actrice, sa beauté et ses prouesses au combat. On regrettera qu’elle ne soit pas plus présente dans le film. La séquence d’action avec elle, Craig et Lynch est assurément l’un des meilleurs moments du film.
Cary Joji Fukunaga a su trouver l’équilibre raisonnable et agréable entre l’action, la légèreté et le cœur. Il y a en effet un excellent mélange des trois tout au long du déroulement, ce qui explique en partie pourquoi la durée ne pose pas de difficultés. Le public est vraiment investi dans les personnages et les enjeux semblent réels, ce qui est loin d’être toujours le cas dans la franchise 007. Et en parlant de ça, comment ne pas évoquer le danger qui plane sur Bond, avec le nouveau méchant de la série : Safin, joué par Rami Malek. Souvent, ce sont les méchants discrets qui sont les plus intimidants. Malek paraît calme et posé, jusqu’à ce qu’il prouve qu’il est prêt à faire tout ce qu’il faut pour obtenir ce qu’il veut. L’acteur offre une performance glaçante et se positionne dans les tout meilleurs affreux-méchants de la saga.
On peut sans doute le voir ainsi, Mourir peut attendre est le Bond quasi parfait, plein d’action spectaculaire, de romance et d’intrigue – tout ce que l’on peut souhaiter avec l’agent britannique. Fukunaga et ses trois co-scénaristes ont produit un film qui parvient à cocher toutes les cases nécessaires à la réussite d’un film de James Bond et qui, à l’instar du meilleur film de Craig, Skyfall, se concentre sur l’humanité du personnage, explorant ses vulnérabilités à son avantage. Un sentiment d’effroi et de mélancolie plane sur le film et il n’en est ainsi que meilleur. Enfin, Daniel Craig tire son ultime révérence avec la classe légendaire de 007 et par ce final grandiose, fait entrer cet opus dans la légende Ian Fleming.