Leurs vernissages respectifs se déroulaient en parallèle la veille au soir, au Pavé d’Orsay pour Jérémie Corbeau et à l’Institut Protestant de Théologie pour Philippe François.

Commençons par Jérémie Corbeau qui présente son travail photographique jusqu’au 15 novembre dans la magnifique galerie « Le pavé d’Orsay » au 48 rue de Lille. L’exposition « Par-delà les lignes », c’est en fait deux axes de propositions ayant en commun le noir et blanc, conduisant d’abord sur un jeu de perception, de croisements de plans, pour ensuite dévoiler d’autres photographies  de ces monstres de béton, de ces géants des villes apprivoisés par le regard et l’objectif de Jérémie. Une démarche à la fois esthétique, philosophique et spirituelle qui conduit à un bousculement de nos repères sans l’utilisation pourtant du moindre trucage.

Si la photographie a longtemps été un simple loisir pour ce jeune orléanais, également administrateur des Groupes Bibliques Universitaires de France, son application et sa passion lui ont permis d’être reconnu plus largement, notamment grâce à une série intitulée « Perception » que le Musée des Beaux-Arts de sa ville a présentée en 2014. « Par-delà les lignes » prolonge précisément cette expérience.

Ce questionnement sur notre observation de l’environnement est une vraie colonne vertébrale de son travail. Jérémie Corbeau dit à ce sujet : « Le but de cette exposition est d’ouvrir la réflexion sur le sens que nous donnons aux images que nous percevons. Celles qui nous environnent mais aussi celle que nous avons de nous-mêmes. Le processus de perception ne se limite pas à la réception d’une image, il implique également une interprétation. Puisque notre place dans le monde dépend de la compréhension que nous en avons, n’est-il pas vital de s’interroger sur notre propre subjectivité ? ».

Une galerie esthétiquement sobre et raffinée qui accueille une exposition trouvant là un écrin particulièrement adapté. De quoi, se pauser quelques instant… observer… réfléchir… se laisser à la fois porter et questionner. Et, qui plus est, la possibilité de rencontrer celui qui a immortalisé ces instants et ces lieux, car Jérémie se fait aussi l’hôte des passants entrant dans le Pavé pendant toute la durée de l’exposition.

Après ce premier vernissage, et quelques stations de métro plus loin, arrivée au 83 boulevard Arago dans le 14ème arrondissement, dans le hall de la Faculté de théologie protestante de Paris. Pendant un mois, jusqu’au 30 novembre précisément, le pasteur luthérien alsacien Philippe François, également docteur en théologie, propose une exposition d’art conceptuel, composée de peintures (réalisées par son père Bernard François) et de photographies (en collaboration avec Elisabeth Schlenk) mêlant images, fragments de textes ou autres symboles.

Sous le nom générique de « Luther en automne », cet ensemble de tableaux donne à l’art de regarder le protestantisme, avec poésie, humour et bienveillance… ce que le protestantisme n’a pas toujours su faire, reconnaissons-le vis à vis de l’image. Un heureux changement de perspective qui colle parfaitement à la peau et à l’ADN de Philippe François. Ici, paradoxalement peut-être pour le novice en art contemporain, tout a du sens. Chaque œuvre est le fruit d’une réflexion « humorhistoricospirituelle » (un néologisme dont je veux bien revendiquer l’origine J). D’ailleurs une synthèse est proposée en guise de sous-titrage des tableaux. On peut donc soit simplement déguster du regard et interpréter à sa guise ou choisir de chercher à comprendre ce qui a bien pu passer par la tête de l’artiste pour arriver à ce résultat.

Philippe François se divise au travers de deux expos en même temps, à Paris et en Alsace (jusqu’au 21 janvier à Waldersbach) avant de nous donner rendez-vous pour une expo taille XXL (peut être à l’image de son Blue Jean Clavin Klein) à l’occasion de Protestants en fête 2017 à Strasbourg du 27 au 29 octobre. On a hâte de pouvoir en découvrir un peu plus… mais en attendant, si vous passez par Paris ou Waldersbach, ne manquez par l’occasion d’oser « l’expérience Philippe François ». Perso, j’ai kiffé !