Le succès considérable rencontré par la série En thérapie reflète la familiarité que nos concitoyens entretiennent avec ce type de démarche. Le psychanalyste Gérard Haddad vient de publier « A l’origine de la violence » (Salvator, 192 p. 18,80 €). Il nous explique les origines, la diversité, les spécificités de la psychanalyse.
« Les psychothérapies telles qu’on les pratique relèvent de doctrines très nombreuses, explique le praticien. Aussi convient-il de définir le terme selon son étymologie. Une psychothérapie consiste à traiter les souffrances psychiques d’un individu par l’usage exclusif de la parole, par l’échange de paroles. » La psychothérapie est une technique très ancienne. « Moïse Maïmonide, à la fois rabbin et médecin, vivait à la fin du XIIème siècle, nous rappelle Gérard Haddad. Il a notamment rédigé un traité de l’asthme. Au Pacha du Caire, qui souffrait de ce type de pathologie, Maïmonide a expliqué qu’elle était conditionnée par son angoisse de la mort et que, pour en guérir, le prince devait se rendre chez un spécialiste de l’âme et lui parler de cette angoisse. »
Sigmund Freud a inventé une forme de psychothérapie particulière qu’on appelle psychanalyse. D’autres techniques psychothérapiques existent aujourd’hui : Rogérienne, Behavioriste, thérapies brèves, perdurent aujourd’hui, qui relèvent d’un souci comparable. « On peut penser que la confession, chez les catholiques, a des effets thérapeutiques, estime encore Gérard Haddad. Quant au psychologue Émile Coué (1857-1926), dont la méthode de développement personnel repose sur l’auto-persuasion, comment ne pas en constater le succès, de nos jours, avec tous ces livres qui recommandent d’être positif avec soi-même ? »
La psychanalyse reste une pratique à part. Elle a connu bien des transformations, de schismes depuis cent ans ; il est parfois difficile de voir clair parmi ses différentes familles, au point que nombre de gens déclarent : « je vois un psy », sans que l’on sache s’ils parlent d’un psy-chologue, d’un psy-chothérapeute ou d’un psy-chanalyste.
Entre freudiens, jungiens, lacaniens, pour ne parler que des grandes classifications, comment retrouver son chemin ? « La psychanalyse est un archipel dont chaque école est comme une île, nous déclare Gérard Haddad. En dépit de leurs divergences, qui prennent souvent leur source de querelles personnelles, ces multiples écoles partent du même postulat, à savoir que notre psychisme est déterminé par notre inconscient. Freud donnait une importance primordiale à la sexualité notant que nous avons deux libidos, une libido narcissique, associé à notre moi, une libido sexuelle. Pour Jung, ces libidos n’en faisaient qu’une et la question sexuelle, sans être occultée, se trouvait associée à d’autres. Parce que Freud et Jung se sont brouillés, celui-ci n’a pas été autorisé à utiliser le terme de psychanalyse, qu’il a remplacé par psychologie des profondeurs, mais la démarche était semblable. »
Quant à Lacan, il a inscrit son travail dans le droit fil de celui de Freud, tout en se distinguant. « Il attribue une attention soutenue aux structures du langage, explique Gérard Haddad. En s’inspirant des travaux de Saussure et des linguistes, il plaçait les mots prononcés par le patient au centre de la cure. Et parce qu’il estimait important de donner de la souplesse au déroulement d’une séance, il a rompu avec les règles très sévères établies par les freudiens de stricte obédience. »
Quelles étaient ces règles, de quelle manière Lacan les a-t-il fait évoluer ? On voudrait poser toutes ces questions, mais Gérard Haddad nous fait observer que le temps qu’il nous avait accordé touche à sa fin. Il se lève, nous encourage à partir d’une main ferme. Il nous faudra revenir.
(A suivre…)