À l’origine du projet d’exposition mené par le Louvre aujourd’hui, il y a le désir de célébrer deux anniversaires : celui des débuts de la guerre de libération de la Grèce et celui de l’entrée de la Vénus de Milo dans les collections nationales, la même année 1821, il y a exactement 200 ans. À partir de cette date, la petite province oubliée de l’Empire turc est redevenue un pays auquel les Français, plus largement les Européens, se sont intéressés dans sa globalité.
Redécouverte du pays
Pour la première fois, le Louvre propose une approche chronologique de la Grèce et de ses rapports avec la France à partir de l’époque moderne, quand elle devient un sujet d’étude qui renouvelle les études classiques. Les Occidentaux découvrent, en même temps, un pays qui lutte pour son indépendance avec son histoire propre, sa religion et son difficile cheminement de nation indépendante dans un environnement souvent hostile. L’exposition débute avec les récits des ambassadeurs qui passent par Athènes en se rendant à Constantinople, capitale de l’Empire ottoman. De très émouvants dessins du Parthénon témoignent de leur passage, avant le saccage opéré par lord Elgin, et montrent le temple tel qu’il était au XVIIIe siècle, avec ses bas-reliefs encore en place. Les romantiques prennent le relais lors de la guerre pour l’indépendance qui débute en 1821. Delacroix s’enflamme avec de célèbres tableaux comme La Grèce sur les ruines de Missolonghi ou Les massacres de Chios qui contribuent à rendre très populaire cette cause.
Bouleversement des connaissances
La lutte pour l’indépendance se déroule parallèlement à un véritable essor de l’archéologie. L’école française d’Athènes est créée en 1846, de nombreux chantiers de fouilles sont lancés. À la fin du XIXe siècle, plus personne ne conteste que l’architecture antique était polychrome, ce qui était inconcevable aux siècles précédents. Autre domaine qui bénéficie d’un nouvel intérêt : la période byzantine, ses palais et surtout ses églises et objets d’art religieux. La mode se répand en France de construire des églises catholiques en forme de croix grecque, ou décorées à la mode byzantine. Parallèlement, le Louvre montre aussi comment les Grecs se sont ouverts à l’Occident pour devenir un État moderne, en fondant par exemple une école des Beaux-Arts à Athènes et en favorisant le déplacement des artistes en Europe. L’instauration d’une royauté issue de familles princières allemande puis danoise favorise aussi les échanges avec l’Europe. L’exposition s’achève sur la période de difficultés et d’incertitudes qui commence à la fin du XIXe siècle avec les guerres balkaniques et s’achève par une nouvelle guerre gréco-turque en 1922. Malgré les nombreux drames humains provoqués par le déplacement forcé de populations, le pays se transforme et rentre pleinement dans le XXe siècle avec son identité propre. Les visiteurs habitués aux splendeurs de la période classique ou aux belles photos de plages paradisiaques seront surpris par la diversité des œuvres présentées. De quoi remettre en perspective bien des connaissances sur ce pays.