Severance, série dystopique qui a marqué l’année 2022 lors de sa sortie, revient prochainement sur la plateforme Apple TV+. Après le succès de la première saison, son avenir semblait garanti. Sauf que la grève des acteurs et des scénaristes courant 2023 est passée par là… Malgré des rumeurs d’annulation, les producteurs et la plateforme de diffusion ont tenu bon mais les fidèles spectateurs ont tout de même dû prendre leur mal en patience en attente d’informations précises. Après un teaser récent sur les réseaux sociaux et le premier trailer de Severance saison 2, une date de sortie est enfin donnée : le 17 janvier 2025. L’ensemble des épisodes devraient être mis en ligne en même temps permettant le fameux binge-watching aux passionnés.

Alors, profitons de cette annonce pour revenir sur la saison 1 et vous donner l’envie peut-être de la découvrir sur Apple TV+ si vous étiez passé à côté.

Précédemment dans Severance

Severance raconte l’histoire de Mark Scout (Adam Scott), l’un des employés de Lumon Industries ayant subi une « dissociation », la procédure médicale controversée qui donne son nom à la série (« severance » en anglais). Les individus dissociés comme Mark et ses collègues Irving (John Turturro) et Dylan (Zach Cherry) ont leurs souvenirs de travail complètement séparés de leurs souvenirs personnels. En pratique, cela signifie que lorsqu’ils sont au bureau, ils sont complètement différents de ceux qu’ils sont à l’extérieur – ils sont tous deux moitiés autonomes de la même personne. Mark et ses collègues semblent d’abord satisfaits de vivre leur étrange demi-existence partagée, sous la houlette de leur patronne dominatrice, Mme Cobel (Patricia Arquette), et de son larbin, M. Milchick (Tramell Tillman). Tout change lorsqu’une nouvelle employée rejoint l’équipe, Helly (Britt Lower), qui refuse d’accepter son cette situation pourtant semble-t-il voulue par son « exter », sa moitié extérieure à l’entreprise. La rébellion d’Helly, associée au retour mystérieux de Petey (Yul Vazquez), le meilleur ami de Mark au travail, pousse ce dernier à enquêter sur la vérité qui se cache derrière Lumon et son programme. Ce qu’il découvre met en évidence une sinistre conspiration qui s’étend bien au-delà des murs de l’entreprise.

Imaginez donc que vous puissiez déconnecter complètement votre cerveau du moment où vous arrivez à votre travail chaque jour jusqu’au moment où vous le quittez.

© Wilson Webb – Apple TV+ – Endeavor Content – Red Hour Films

La question de l’embrigadement

Séduisante idée somme toute, mais ferions-nous finalement une fatale erreur ? C’est la question au cœur de ce thriller psychologique de science-fiction exceptionnel. Non seulement la prémisse de Severance est saisissante, mais elle est aussi clairement satirique. Le réalisateur Ben Stiller et le showrunner Dan Erickson exploitent à fond le concept de la série, en abordant tous les sujets, de la façon dont les grandes entreprises exploitent leurs employés à la complicité occasionnelle de ces derniers dans l’accomplissement de leurs tâches. En cours de route, Severance se moque également des primes de rendement, des conseils d’administration sans visage, de la mythologisation des entreprises, mais aussi en surfant continuellement sur la question de l’embrigadement sectaire.

Dans l’ensemble, Stiller et Erickson traitent ces sujets lourds avec une habileté admirable tout au long de cette première saison, ne s’aventurant qu’occasionnellement sur un terrain plus lourd à l’approche de la ligne d’arrivée. Vous ne le remarquerez d’ailleurs probablement pas, grâce aux éléments de l’intrigue mystérieuse du thriller qui se superposent à la satire de Severance.

Le récit tortueux de la série nous attire dès la première scène, accumulant progressivement de plus en plus d’indices que nous devons reconstituer d’une manière à la fois stressante et addictive.

Et pendant que nous jouons au détective en fauteuil, la partition paranoïaque de Theodore Shapiro nous installe dans cet univers aseptisé de Lumon Industries – comme Mark, Helly, Irving et Dylan, nous sommes à la fois désespérés de trouver des réponses et terrifiés par ce que nous allons trouver.

Une série engageante sur le plan émotionnel

Cette atmosphère inquiétante est renforcée par la cinématographie de Jessica Lee Gagné et Matt Mitchell, ainsi que par les décors de Jeremy Hindle, concepteur de la production. Hindle incorpore un design rétro aux espaces cloisonné de bureau les présentant comme une île à la dérive du temps et de l’espace (comme leurs occupants), et les couloirs labyrinthiques de l’entreprise, qui font écho à la désorientation non seulement des employés de Lumon, mais aussi du spectateur. Pourtant, ce qui différencie Severance d’efforts similaires avec des séries de science-fiction dystopiques avec de gros budgets et des ambitions thématiques et artistiques parfois encore plus grandes – c’est à quel point elle est engageante sur le plan émotionnel. Bien sûr, la série est intellectuellement stimulante, mais ce qui nous font revenir, c’est bien Mark et ses collègues. Le parcours de Mark en particulier – sa décision d’oublier littéralement son chagrin, plutôt que de l’affronter – est tellement touchant que nous nous y attachons immédiatement.

Pris ensemble, tous ces éléments – l’écriture, la réalisation, la cinématographie, la conception de la production et le jeu remarquable des acteurs – constituent une série presque sans faille si ce n’est le cliffhanger redoutable de fin de saison qui a rendu encore plus intenable l’attende des fans… mais tout vient à point à qui sait attendre, comme nous le disait déjà, il y a bien longtemps, le poète réformateur Clément Marot.