Soudain seuls, en salle ce premier mercredi de décembre, co-écrit et réalisé par Thomas Bidegain (Selfie, Les Cowboys) et adaptation du roman éponyme d’Isabelle Autissier sorti en 2015. Si le genre survival, ou film de survie pour le dire en bon français, a largement livré des récits du même acabit, Soudain seuls sort clairement du lot par la spécificité du couple et de l’approche qui en est faite, déplaçant habilement l’axe principal, le tout porté par un duo extraordinaire.
Ben et Laura font le tour du monde en bateau. Un voyage de la dernière chance pour leur couple. Arrivés près des côtes antarctiques, ils font un détour pour explorer une île. Mais une fois sur place, leur bateau disparaît dans une tempête. Soudain seuls, exposés au froid, à la faim, à la peur et livrés aux éléments déchaînés, Ben et Laura devront aller au bout de leur capacité de survie – et de la vérité de leur couple.
« Si on survit à tout ça, on survivra à jamais ! »
Soudain Seuls c’est d’abord et surtout un casting réduit au minimum nécessaire pour raconter cette histoire, Gilles Lellouche et Mélanie Thierry qui forment ici le couple d’acteurs parfait… même s’il connait dans le scénario la crise, les douleurs et les doutes, et toutes sortes encore d’émotions et de péripéties. Mais c’est une alchimie remarquable qui s’opère, faite de douceur, de tendresse, de sensualité mais aussi de brutalité… de maintes nuances subtiles, donnant une vraie authenticité aux personnages et au déroulement des faits. On sourit, on frémit, on espère, on désespère, on se fâche, et on aime avec eux. C’est bien sûr le talent de l’un et de l’autre qui est là éclatant à l’écran, mais ce sont aussi des dialogues efficaces comme ces quelques répliques : « Si on survit à tout ça, on survivra à jamais ! », « Je n’arrivais pas à vivre sans toi… Je n’arrivais pas à mourir sans toi… » , « C’est toi ma maison ! ».
La nature majestueuse de l’Islande
Comme écrin à cette dantesque fresque romantique, la caméra de Thomas Bidegain se paye un décor naturel onirique. Et c’est tout le paradoxe d’ailleurs d’un tel récit… l’horreur et la mort se tapissent dans la beauté saisissante d’une nature majestueuse et dans l’immensité de plan aériens au bord de terrains vierges de l’Islande.
Infiniment grand et infiniment petit se confrontent alors, tant dans les faits concrets de l’histoire que dans les multiples sujets abordés. Car Bidegain parvient à faire de ce long métrage de survie, un film qui parle au cœur, qui touchent à des fondements de l’existence et de la vie à deux. Et dans les multiples thématiques que l’on pourra percevoir me frappe celle du choix. Si quand tout va bien, choisir peut paraitre une chose anodine, sur laquelle on aimera philosopher autour du renoncement, ce verbe prend une tout autre dimension face à l’urgence vitale. Qu’est-ce qui alors impulse intrinsèquement la décision ? Et viennent alors avec, les conséquences que l’on ne maîtrise pas toujours, dont on n’a pas conscience sur le moment. Et puis encore la question de l’acceptation future et de la culpabilité.
Enfin aussi, plaisir d’observer l’intelligence du cinéaste de finir comme il le faut… et je ne vous dévoilerai évidemment pas la manière. Car tout aurait pu sans doute basculer dans cette conclusion et transformer ce film bouleversant et maîtrisé en un objet banal, voire décevant. Mais, comme la preuve par les actes, les choix du cinéaste furent juste parfaits, du moins pour moi… avec une dernière image et l’apparition des noms de Gilles Lellouche et Mélanie Thierry comme le point d’orgue qui libère le spectateur au sens propre comme au sens figuré.