Inspiré de faits réels, The Woman King suit le destin épique de la Générale Nanisca, qui entraîne une nouvelle génération de recrues et les prépare à la bataille contre un ennemi déterminé à détruire leur mode de vie. Il y a des causes qui méritent d’être défendues…
Il aura fallu six ans pour donner vie à l’un des films les plus attendus, The Woman King ! La réalisatrice Gina Prince-Bythewood et l’actrice oscarisée Viola Davis (Fences, La couleur des sentiments, Les veuves, le blues de Ma Reyney, la série Murder…) ont fait équipe pour raconter cette histoire absolument captivante et inspirée de faits réels.
Dans les années 1800, le royaume du Dahomey – qui fait aujourd’hui partie de l’actuelle République du Bénin – comptait un régiment militaire entièrement féminin appelé Agojie, dont la férocité et les prouesses au combat étaient si connues, même en Europe, qu’elles étaient surnommées « les amazones du Dahomey », en référence aux histoires des femmes guerrières de la mythologie grecque.
L’histoire se concentre donc sur la Générale Nanisca (Viola Davis), sous le règne du nouveau roi Ghezo (John Boyega). Tout commence avec un assaut des Agojie (qui ont aussi inspiré les Dora Milaje de Black Panther), qui attaquent un village pour libérer des prisonniers. À cette époque, les guerres de territoires faisaient le bénéfice de tout le monde car les prisonniers étaient revendus comme esclaves. Ayant gagné le respect et la confiance du roi, Nanisca tente de montrer à Ghezo que les Dahomey ne doivent plus participer au commerce d’esclaves et qu’ils ne doivent plus jamais vendre leurs captifs de guerre aux esclavagistes.
Si l’accent est mis sur Nanisca, avec tout le spectaculaire, notamment, de scènes de combats mémorables, Gina Prince-Bythewood nous propose aussi un arc narratif fascinant avec l’histoire de Nawi (Thuso Mbedu). Lorsque nous la rencontrons pour la première fois, c’est une jeune femme qui refuse d’accepter un mari après plusieurs tentatives de mariage par son père adoptif. Il la donne alors au roi, ce qui la conduit à s’entraîner pour devenir une Agojie. L’imbrication de la petite dans la grande histoire, ce mélange de l’épique et de l’intime, permet aux scénaristes de créer un récit passionnant dans lequel on peut entrer de diverses manières.
À 57 ans, Viola Davis livre l’une de ses meilleures prestations à mon goût, et je ne serais pas surpris que son interprétation de Nanisca lui vaille une autre nomination au titre de meilleure actrice pendant la saison des prix… Et puis il y a l’actrice sud-africaine Thuso Mbedu qui, après avoir fait un travail déjà fantastique dans The Underground Railroad de Barry Jenkins, émerveille ici dans ce rôle de jeune apprentie guerrière, en apportant qui plus est beaucoup d’émotion. Là encore, son nom pourrait bien figurer dans la liste des nominations pour le prix du second rôle féminin dans quelques mois aux Oscars.
Mais à leurs côtés, évoquons Lashana Lynch, qui incarne une guerrière courageuse et loyale nommée Izogie, dont la tâche principale est de former Nawi et les autres recrues. La performance de Lynch est émouvante et elle rayonne du début à la fin. Sheila Atim offre également une performance de tout premier plan dans le rôle d’Amenza. Bras droit de Nanisca, elle la conseille dans ses choix les plus difficiles. On assiste alors à des moments extrêmement poignants qui figurent dans les plus marquants du film.
Quelques mots sur les thématiques qui fondent le scénario. The Woman King traite bien évidemment de l’esclavage. Mais il aborde cette question avec franchise et esprit critique, en travaillant le fait que l’esclavage était aussi une réalité interne à l’Afrique (le film se déroule, rappelons-le, dans les années 1800). Tout au long du film, Ghezo, le roi du Dahomey, est mis au défi par certains membres de son propre royaume de mettre fin à cette pratique. Il se souvient même d’un événement traumatisant de son passé, lorsque son propre frère a vendu sa mère en esclavage. Mais il continue, jusque-là, n’étant pas sûr que son royaume puisse survivre et prospérer financièrement autrement. Avec l’histoire très émouvante de la Générale Nanisca et de Nawi, viennent se greffer d’autres sujets (que je ne peux tous dévoiler ici sous peine d’ouvrir à certaines informations qu’il vous faudra découvrir progressivement). Mais c’est la question de la vengeance notamment, de l’émancipation aussi, de l’égalité des genres, de métissage, d’héroïsme, de transmission… Pour un film d’action et de grand spectacle, les émotions et la profondeur sont tout de même largement au rendez-vous !
Je finirai sur des aspects plus techniques. The Woman King a été tourné en Afrique du Sud et cela se voit… Des images, une photo, purement splendides et la musique du génialissime trompettiste, compositeur et arrangeur de jazz américain Terence Blanchard qui, naturellement, nous dirige dans des sonorités très africaines qui accompagne parfaitement le long-métrage. Une partition qui pourrait très bien lui valoir une troisième nomination aux Oscars ; elle s’inscrit dans la même veine culturelle, tonale et émotionnelle que les partitions oscarisées du Roi Lion et de Black Panther. Pour renforcer encore la spécificité culturelle de la partition, Blanchard a travaillé avec le compositeur et guitariste d’origine béninoise Lionel Loueke pour s’assurer que les éléments rythmiques et harmoniques de la partition avaient leurs racines dans la musique de la région. Blanchard dit qu’il « s’est souvenu qu’une grande partie de la musique de cette région est très mélodique, presque comme les spirituals américains d’une certaine manière, mais avec un type différent de progression harmonique ».
Spectaculaire, intelligent et avec des personnages inspirants, The Woman King parvient à être à la fois intime et épique tout en mettant en scène certaines des plus belles séquences d’action que vous verrez cette année.