Beaucoup d’auteurs et pas des moindres, ont déjà écrit sur Venise : Morand, Lacan, Sartre, pour ne citer que ceux auxquels Jean-Paul Kauffmann se réfère le plus. Lui-même aime l’Italie et a souvent séjourné à Venise. L’originalité de son livre est de s’en prendre aux 49 églises de la ville, fermées, abandonnées, que l’on ne peut visiter ; zones d’ombre et d’oubli dans une ville que traversent chaque année 30 millions de touristes. La quête des clés susceptibles d’ouvrir la porte de ces vieux lieux religieux, sert de trame au livre et nous conduit à travers les dédales des administrations vénitiennes auxquelles appartiennent ces églises délaissées, tout autant que dans le dédale des venelles de la ville, délaissées, elles, par le touriste.
Il peut sembler étonnant de s’intéresser à des « sanctuaires morts ». L’idée en est venue à l’auteur à partir d’une peinture dont le souvenir, quoique vague et estompé, le hante. Il se rappelle que, dans sa jeunesse elle était accrochée dans un bâtiment, mais lequel ? Après des recherches infructueuses dans palais et églises ouvertes au public, seules les églises closes abritent peut-être le tableau éblouissant de lumière. D’où la quête de l’auteur et sa persévérance à vouloir se faire ouvrir des portes cadenassées depuis des décennies. Mais ces sanctuaires, synonymes de silence et d’obscurité, évoquent autre chose : ils renvoient inévitablement au passé de Kauffmann, à son interminable captivité dans les geôles du Liban. Le thème de l’enfermement est d’ailleurs au cœur de la plupart de ses […]