Tout le monde connaissait Vesoul grâce à Brel, celui qui a voulu voir… mais ça c’était avant ! Car aujourd’hui la ville de Vesoul est visitée par tous les passionnés de cinéma asiatique grâce à son Festival International des Cinémas d’Asie (FICA). Chaque année, et depuis 31 ans, la cité de Haute-Saône accueille ce festival qui met en lumière la richesse et la diversité des productions cinématographiques asiatiques.
Le FICA a pour objectif de promouvoir les cinémas asiatiques en France et de favoriser les échanges culturels entre l’Asie et l’Europe. Un pluriel fondamental dans la compréhension du Festival et de sa volonté de ne pas se cantonner aux cinématographies de l’Extrême-Orient, mais de l’ouvrir à toutes les cinématographies de tous les bassins de culture du plus vaste des cinq continents qu’est l’Asie au sens géographique du terme, c’est-à-dire, du canal de Suez à l’océan Indien et de l’Oural à l’océan Pacifique. Créé en 1995 par Martine et Jean-Marc Thérouanne, tous deux portés par cet amour passionnel pour l’Asie, son succès ne se dément pas au fil des ans. Le Festival propose une sélection de films récents, de classiques et d’avant-premières couvrant une multitude de genres et de pays, allant du Japon à l’Inde, en passant par la Chine, Israël, la Corée du Sud, le Kazakhstan et bien d’autres encore, naturellement.
L’édition 2025 du FICA s’est tenue du 11 au 18 février avec 9 long-métrages et 8 documentaires en compétition. Des invités prestigieux, réalisateurs, acteurs, producteurs, journalistes étaient présents pour échanger avec le public et partager leur passion pour le cinéma. Plus de 35 000 spectateurs de tous âges, faut-il le préciser, car si les cheveux gris étaient bien présents, la jeunesse n’a pas manqué non plus, avec des partenariats judicieux mis en place avec les lycées et collèges de la région.
Chaque année, le festival choisi de mettre le focus sur certains pays ou réalisateur. En 2025, ce fut d’abord un hommage rendu à Jia Zhang-Ke, au-travers d’une rétrospective de ses films et d’une master class. Il est l’un des tout meilleurs cinéastes chinois et il était présent en Haute-Saône pour présider également le Jury international. Le thème de la famille avec le titre « Génération(s) a permis d’offrir aux festivaliers une sélection remarquable, avec des films comme Footnote de Joseph Cedar (Israël), Une affaire de famille de Kore-eda Hirokazu (Japon), Bye Bye Tibériade de Lina Soualem (Palestine), Délinquant juvénile de Kang Yi-kwan (Corée-du-sud)… Des regards sur le cinéma de certains pays ont été proposés, notamment sur le cinéma birman, trop méconnu, et celui de Hong-Kong avec l’un des meilleurs spécialistes du genre, Frédéric Ambroisine, qui a pu nous régaler par ses anecdotes et présentations. Enfin, le public de Vesoul a pu aussi profiter de plusieurs avant-premières, des films qui sortiront dans les semaines à venir, dont l’excellent Black Dog du chinois Hu Guan, récompensé en 2024 à Cannes dans la sélection Un Certain regard (sortie en France le 5 mars).
Les nombreux Jurys présents dans ce Festival ont permis de récompenser des films très divers dont deux sont sortis du lot avec plusieurs récompenses :
- Abel, un film kazakh d’Elzat Eskendir (3 récompenses) qui raconte le destin cruel d’un berger résilient, porteur du rêve modeste de garantir ce qui lui revient de droit. Doit-il céder à la corruption ou se battre pour ce qui est juste ?
- Deal at the Border, un thriller du Kirghizistan de Dastan Zhapar Ryskeldi (3 récompenses) qui aborde la traite des êtres humains, les trafics de drogue mais aussi, et surtout, la dimension sacrée qui entoure la mort.
L’autre grand gagnant est évidemment le film ayant reçu le Cyclo d’or, un film sud-coréen de Park Ri-woong, Le pays du matin calme (The Land of Morning Calm) qui brosse un portrait très pessimiste de l’évolution de la Corée.
Palmarès du FICA 2025 :
Jury international
Président : Jia Zhang-Ke, réalisateur (Chine)
Membres : Mohammad Atebbai, producteur, distributeur (Iran), Teresa Kwong, productrice (Hong Kong), Janet Wu, productrice (Chine).
Cyclo d’or : The Land of Morning Calm de Park Ri-woong (Corée)
Regarder ce film, c’est comme plonger dans l’océan. Le réalisateur nous entraîne sous la surface apaisante pour nous immerger dans les profondeurs de la vie, au cœur des courants sous-jacents d’une réalité en perpétuelle agitation. Il parvient, contre toute attente, à conserver une simplicité fluide dans son langage cinématographique tout en restant profondément attentif à son sujet. Cela nous permet d’observer de près, de réfléchir et d’être touchés par la lumière de la nature humaine.
Grand prix du Jury : Abel d’Elzat Eskendir (Kazakhstan)
Prix du Jury : Deal at the Border de Dastan Zhapar Ryskeldi (Kirghizistan)
Mention spéciale : To Kill a Mongolian Horse de Jiang Xiaoxuan (Chine)
Prix du Jury NETPAC (Network for the Promotion of Asian Cinema)
Président : Jo Ji-hoon, universitaire (Corée)
Membres : Patrick Campos, programmateur (Philippines), Aloÿse de La Faye, spécialiste du cinéma birman
Abel d’Elzat Eskendir (Kazakhstan)
Prix du Jury Marc Haaz
Présidente : Patra Au, actrice (Hong Kong)
Membres : Jin Huaqing, réalisateur (Chine) et Maung Sun, réalisateur (Myanmar)
Deal at the Border de Dastan Zhapar Ryskeldi (Kirghizistan)
Prix du Jury de la critique
Président : Hubert Niogret, (critique, Positif)
Membres : Frédéric Ambroisine (spécialiste du cinéma hongkongais), Jean-Luc Gadreau (critique, France Culture)
Abel d’Elzat Eskendir (Kazakhstan)
Parmi la sélection des 9 films en compétition, tous intéressants, le film Abel nous a semblé la révélation d’un vrai cinéaste par la qualité de sa mise en scène. L’organisation de l’espace, le rythme de ses longs plans, la direction d’acteurs non professionnels sont les atouts de ce premier film déjà mature.
Prix des Amis du Musée Guimet
Président : Christophe Calame
Membres : Nicole Judet-Brugier, Chantal Perianin
Deal at the Border de Dastan Zhapar Ryskeldi (Kirghizistan)
Coup de cœur des Amis du Musée Guimet : To Kill a Mongolian Horse de Jang Xiaoxuan (Chine)
Prix du public du Film de fiction : La Femme qui en savait trop de Nader Saeivar (Iran)
Prix du Jury lycéen : Kono Basho de Jaime Pacena II (Philippines)
Prix du public du Film documentaire : My Dearest Viet de Kawabata Kohei (Japon, Vietnam)
Prix du Jury jeune : Bittersweet Honey (Birmanie)