Quand on s’interroge, avec cet ouvrage, sur le drame de la pauvreté, il est essentiel de mesurer la distance qu’il y a entre notre vision de ce fait omniprésent et celle qu’on pouvait en avoir dans les temps anciens, spécialement au Moyen Âge, auxquels ce livre s’attache. La misère n’est alors nullement prise en charge par les pouvoirs publics ; il n’est rien alors qui ressemble à notre Sécurité Sociale. Telle est la première différence. L’autre est dans la mentalité dominante. Aujourd’hui les religions ne sont pas dans le coup, ou très peu. Jadis elles s’imposaient. Tout le monde était concerné et partageait la peur de la damnation, bien plus pesante que l’espoir d’un séjour paradisiaque. Le pauvre subissait la contrainte de sa situation ; le riche se savait surveillé en haut-lieu, en sorte que la misère à sa porte le concernait aussi.
L’originalité de l’ouvrage réside dans l’examen précis du vocabulaire employé concernant les miséreux. Un vocabulaire immense était utilisé, les mots variant d’un lieu à l’autre, d’un moment à l’autre. On voit fort bien que, placé devant la nécessité de se soucier des pauvres, les riches, les puissants s’efforçaient de distinguer le mieux possible le pauvre contraint, par exemple l’homme blessé ou malade, la femme et ses enfants […]