Après les avoir proposés en quatre courts métrages séparés en septembre dernier, Netflix propose découvrir l’adaptation de Wes Anderson en un seul et même film : La Merveilleuse Histoire de Henry Sugar et trois autres contes. Ces nouvelles de Roald Dahl, pleines de fantaisie, sont en même temps, porteuses d’une profonde sagesse jaillissant tant de la lumière que des ténèbres.
Le plus long des quatre vient d’être récompensé de l’Oscar du meilleur court-métrage de fiction, première statuette personnelle dans la longue carrière de ce génial réalisateur, au style et à l’écriture reconnaissables entre mille.
Jusque-là, seul The Grand Budapest Hotel, sorti en 2014, avait été remarqué par l’Académie des Oscars, et récompensé par plusieurs prix : ceux des meilleurs costumes, meilleures coiffures et meilleur maquillage, meilleure musique pour Alexandre Desplat et meilleurs décors. Mais rien pour Wes Anderson en tant que réalisateur… Dix ans plus tard, et de la plus étonnantes des manières, La Merveilleuse Histoire de Henry Sugar remporte le prix du meilleur court-métrage de fiction, malgré une sortie passée presque inaperçue, et un réalisateur absent pour recevoir son prix, travaillant d’ores et déjà sur son prochain et douzième long-métrage The Phoenician Scheme.
Une pure merveille, véritable petit bijou de cinéma Andersonien de 37 minutes, il est disponible sur Netflix en version long métrage, puisque adossé à trois autres contes respectivement intitulés Le Cygne, Le Preneur de rats et Venin, de la même veine, mais plus courts (3 x 17 minutes) et toujours du même auteur initial, Roald Dahl.
Roald Dahl (1916-1990) est un auteur britannique qui a écrit 19 livres pour enfants au cours de sa carrière de plusieurs décennies. Ses œuvres les plus populaires sont James et la pêche géante (1961) et Charlie et la chocolaterie (1964). Il a été qualifié de « l’un des plus grands conteurs pour enfants du XXème siècle ».
Fantastic Mr. Fox, première adaptation de Roald Dahl par Wes Anderson
Les fans de Wes Anderson se souviendront peut-être de Welcome to the Dahl House, un article que le cinéaste a écrit en 2002 pour le New York Times Magazine sur sa visite de la Gipsy House de Roald Dahl. C’est là qu’Anderson a demandé et obtenu de Liccy, la veuve de Dahl, l’autorisation d’adapter l’excellent Fantastic Mr. Fox à l’écran, un rêve qui a été réalisé sept ans plus tard sous la forme d’un long métrage en stop-motion. Le film a connu un succès retentissant et, au fil des ans, Anderson a laissé entendre qu’il comptait réaliser d’autres adaptations de Dahl.
Comme ce dernier, La Merveilleuse Histoire de Henry Sugar et trois autres contes déborde de la signature artistique d’Anderson, mais contrairement au scénario fantaisiste et modernisé de Mr. Fox, ce quatuor reste bien plus fidèle au matériau d’origine. Les charmantes interprétations d’une petite troupe de vedettes britanniques apparaissent dans au moins deux contes, chacune ancrant davantage les œuvres dans le temps et l’espace, comme si Dahl lui-même les lisait et offrait des aperçus de ce qui se tramait dans son esprit.
La Merveilleuse Histoire de Henry Sugar prend la forme d’une merveilleuse parabole sur la croissance spirituelle.
Le scénario suit les aventures du richissime Henry Sugar (Benedict Cumberbatch), accro aux jeux d’argent, alors qu’il apprend l’existence d’un gourou capable de voir sans utiliser ses yeux. Dès lors, il se lance dans l’apprentissage de cette faculté mystique.
Un casting réduit mais efficace
Chaque comédien narre le texte de Dahl directement à la caméra tout en mettant en scène une intrigue tentaculaire qui se termine par une épiphanie. Une histoire qui permet au cinéaste de retourner à l’essence de son style avec un casting réduit mais de première catégorie et un temps de tournage minimal, sans pour autant renoncer à l’univers cinématographique bâti tout au long de sa carrière. Le film est inondé d’éruptions pastel, avec des décors qui ressemblent souvent à d’immenses maisons de poupées et qui, à d’autres moments, se replient ou s’ouvrent comme de gigantesques livres pop-up.
Avec trois autres contes, Wes Anderson développe, dans son même style cinématographique, des thématiques toujours percutantes et plus sombre, comme celle notamment du harcèlement dans Le Cygne, rivalisant d’adresse pour manier l’art de la métaphore.