Dans cette magnifique province de Picardie, un des joyaux de la nouvelle région Hauts de France, le Musée Calvin, à Noyon (Oise), fait découvrir au grand public, depuis 1930, l’univers du réformateur français Jean Calvin (1509-1564), natif de la ville. Il s’agit de bien autre chose que d’un musée régional.
Calvin constitue en effet une référence pour des centaines de millions de protestants, et d’innombrables francophones. Près de la moitié des visiteurs du Musée Calvin viennent de l’international, et, parmi eux 63,7% de visiteurs coréens ! François Debrabant, son actuel directeur, nous fait découvrir ce lieu de mémoire et d’histoire de la francophonie protestante, et lève le voile sur les manifestations prévues pour les 500 ans de la Réforme, en 2017.
1. Pouvez-vous vous présenter ?
Mon nom est François Debrabant, je suis responsable du service culturel des musées à Noyon et directeur par intérim. Je suis passé, dans ma formation, par un diplôme de l’IEP d’Aix-en-Provence, puis un master et un doctorat en archéologie.
2. Quels sont les points forts du Musée Jean Calvin ?
Le premier aspect est, qu’en plus d’être un musée, il se situe sur l’emplacement de la maison natale de Calvin. Il rappelle les origines noyonnaises de ce réformateur français dont l’essentiel de l’action publique s’est faite à Genève.
En plus de présenter la vie et l’œuvre du réformateur,le musée, dans son approche chronologique, remet en contexte l’apparition du Protestantisme en Picardie et les enjeux des guerres de religions, puis la période du désert. Le musée Jean Calvin est un musée labellisé musée de France et bénéficie à ce titre du soutien du ministère de la culture et de la communication.
Le principal partenaire privé demeure la Société d’Histoire du Protestantisme Français (SHPF). Elle reste propriétaire du bâtiment du musée ainsi que de la moitié des collections présentées de façon permanente. La SHPF soutient activement le musée par une politique de dépôt de ses acquisitions, par une mise à disposition des fonds conservés par la bibliothèque de la SHPF. Le comité scientifique du musée est issu de la SHPF, l’un des référents actuels est M. Olivier Millet professeur d’Université à la Sorbonne.
Le musée Jean Calvin fait aussi partie du réseau des maisons d’écrivains et des patrimoines littéraires de Picardie, ce qui accroit son rayonnement et lui donne un ancrage régional.
3. Jean Calvin est une figure fondatrice de la francophonie protestante, bien au-delà de la France et de la Suisse. Comment cette dimension est-elle mise en valeur dans le musée ?
Dans les expositions passées (2009, 2012) comme dans la présentation permanente, l’accent est mis sur l’œuvre littéraire et l’apport de Jean Calvin dans la naissance de la langue française moderne. Les publications en français plus qu’en latin (comme l’institution de la religion chrétienne) ont une importance capitale. Nous insistons sur la mise en perspective de l’œuvre avec la diffusion de l’imprimé à l’échelle européenne. La diffusion des textes calvinistes en langue française se fait depuis la Suisse à travers tout le Royaume de France et dans les communautés francophones européennes. Ce sont des thèmes abordés aussi lors de nos cycles de conférences.
4. Quel est la part du public francophone / non-francophone dans les visites du musée ?
La part du public étranger oscille entre 40 et 50% selon les années (par ordre décroissant coréens (63.7% de l’ensemble des étrangers), belges (8.5%), néerlandais (6.3%) et anglo-saxons (6.6%). Du fait de la forte proportion de visiteurs étrangers, une attention particulière est donnée à apporter un minimum d’aide à la visite traduite en anglais, coréen, allemand, néerlandais et italien.
5. Quels sont vos projets pour le musée Jean Calvin en vue des 500 ans de la Réforme, l’an prochain ?
Pour la commémoration des 95 thèses de Luther, une exposition mettra en perspective les personnages et l’œuvre de Luther et Calvin. Après une présentation de Luther (moins connu du public français), nous insisterons plus sur la période strasbourgeoise de la vie de Calvin et son rapport avec Zwingli. L’objectif sera aussi d’expliquer les différences entre luthéranisme et calvinisme. Nous terminerons sur une présentation de caricatures contemporaines et postérieures qui réunissent ces deux réformateurs. Le commissariat scientifique est composé de M. Hubert Bost (directeur de l’école pratique des hautes études), M. Kaenel, professeur de l’Université de Lausanne, Mme Mourey et M. Colbus de l’Université Sorbonne (traduction des textes allemands du 16e siècle). Des emprunts sont prévus à la bibliothèque de la SHPF de Paris ainsi qu’à la bibliothèque nationale universitaire (BNU) de Strasbourg. La société des amis du musée Jean Calvin programme un cycle de trois conférences de mai à novembre. Le premier intervenant sera Hubert Bost, commissaire de notre exposition.